Peut-on se fier à la variabilité cardiaque ?

Article écrit par Cyril Schmit (innov.training)

Pour savoir si vous êtes fatigué ou sur une bonne dynamique dans votre préparation, plusieurs indicateurs ont fait l’objet d’investigations. Ensemble, ces indicateurs participent de ce que l’on appelle le suivi de l’état de forme du sportif : on y retrouve des mesures objectives (comme le volume d’entraînement ou l’intensité d’exercice) et subjectives (comme la qualité du sommeil ou l’effort perçu de l’exercice). Ensemble, ces mesures permettent de bien ajuster la charge de l’entraînement. Quid d’un paramètre peu connu : le HRV.


Crédit photo : Rido

Ce que l’on appelle la Variabilité de la Fréquence Cardiaque (mieux connu sous l’anglicisme « HRV »), c’est l’intervalle de temps qui s’écoule entre 2 battements de cœur (voir image). Si votre cœur bat à une fréquence de 60 bpm, sachez que cela ne signifie pas qu’il y a précisément 1 battement fixe à chaque seconde. En réalité, il peut se passer entre 0,9 sec et 1,1 sec entre 2 battements. Ex : 1056 millisecondes – 980 ms – 996ms – 1013ms – 948ms… et ainsi de suite pour finalement arriver à une fréquence cardiaque de 60 bpm.

Faire un suivi du HRV, c’est étudier cette irrégularité entre 2 battements cardiaques.

 

Quel est l’intérêt ? L’objectif est de dégager des hypothèses sur l’état de fonctionnement de votre système nerveux. En effet, cette variabilité cardiaque est influencée à la fois par les branches activatrices et désactivatrices de l’organisme (ex : hausse de l’utilisation d’énergie en situation de stress), ce qui permet d’obtenir des indices sur son bon fonctionnement.

 

Par exemple, grâce aux différents calculs réalisés, on estime aujourd’hui qu’une baisse du HRV est associée à une baisse de l’état de forme / un manque de récupération – ceci pouvant être dû, par exemple, à une branche activatrice moins réactive.

 

 

Malgré cette idée partagée, la mesure de HRV ne fait pas foi aujourd’hui en tant que marqueur incontournable de fatigue pour un sportif. Et ce, pour 3 raisons :

 

  • En premier lieu, le HRV est une mesure contraignante à réaliser. En effet, pour générer un enregistrement fiable, la mesure devrait idéalement être réalisée dès votre réveil, dans un environnement calme et obscur, en position allongée et/ou debout durant 5’ à 7’, et à raison de 3 fois par semaine minimum (pour avoir une consistance de résultats). Cette standardisation du contexte et cette fréquence de réalisation permettraient, alors, d’autoriser un début d’interprétation du signal enregistré.

 

  • En second lieu, les observations divergent pour des mesures HRV qui peuvent pourtant aller dans le même sens. En effet, pour une amélioration du signal HRV par exemple, des performances en baisse, stables, ou en hausse ont pu être observées chez des sportifs entraînés comme moins entraînés. Pour dégager un avis fiable, il semble donc indispensable de réaliser un suivi personnalisé plutôt que d’appliquer des conclusions génériques à un athlète qui effectuerait ce type de mesure pour la 1ère fois.

 

  • Enfin, il est à noter que les calculs réalisables grâce à la mesure du HRV sont divers et complexifient la manœuvre d’interprétation.

 

 

Ensemble, tous ces éléments font aujourd’hui converger les avis vers la conclusion que le HRV ne peut pas encore représenter le Gold Standard des marqueurs de l’état de forme d’un sportif.

 

Un récent papier d’une équipe française résume ainsi les limites qu’il existe encore dans les relations entre la charge d’entraînement et les variations HRV (étude réalisée chez des skieurs élites lors d’un entraînement en altitude) :

« (…) Il n’y a pas de relation causale entre la charge d’entraînement et les patterns HRV de fatigue » (Schmitt et al. 2018)

 

 

Malgré cette limitation, d’autres travaux en cours ont aussi bon espoir à faire de cette mesure un outil quotidien du suivi de l’athlète, en tentant de fiabiliser des mesures HRV réalisées sur 1’, ou encore en démontrant son intérêt pour réajuster un calendrier d’entraînement prédéfini. Affaire à suivre.

 

Peut-on se fier à la variabilité cardiaque ?

 

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