La course à pied en nature diffère-t-elle de la course à pied sur route quant à la nature du travail réalisé par le pied ?

? Nous avions déjà évoqué cette problématique mais il nous semble important d’ajouter de nouveaux éléments.

Il faut tout d’abord considérer plusieurs éléments en opposition :

– la course chaussée vs la course pieds nus

– la course en minimaliste vs la course en chaussure « normale » et oversize

– la course sur route (plat et non-technique) vs la course en trail (terrain instable avec de la déclivité)

Nous n’allons pas rentrer dans des considérations trop scientifiques (les publications sont extrêmement nombreuses sur ces sujets) mais simplement émettre quelques idées et faits. Pendant 99% de son histoire, l’homme a couru et marché pieds nus. Nos ancêtres, grâce à leurs adaptations à l’endurance (système locomoteur, transpiration, énergie élastique (voûte plantaire, tendon d’Achille et triceps sural)) chassaient leurs proies à l’épuisement. La chaussure de course est donc une invention récente qui a modifié notre rapport à la terre et la biomécanique de notre foulée. Rappelons que le pied est une partie complexe du corps humain de par la multiplicité des muscles, ligaments, articulations, os et tendons, qui le composent. Le port de chaussures enferme cette partie du corps dans une gangue qui nuit à son dynamisme en réduisant les amplitudes articulaires, en affaiblissant le travail musculaire et en brouillant la proprioceptivité (informations en direction du cerveau issues des terminaisons nerveuses de la plante du pied, et qui renseignent sur la position du corps dans l’espace). Bien entendu, plus la chaussure est rigide et plus ces effets sont importants.

Vous n’êtes pas convaincus ? Rendez-vous sur le gazon de votre stade d’athlétisme ou de football. Echauffez-vous pieds nus et réalisez quelques lignes droites. Vous allez prendre beaucoup de plaisir, vous allez certainement éviter de poser le talon au sol (c’est douloureux), mais surtout vous allez avoir des micro-courbatures à +24 et +48h, les fameux DOMS, dues au travail de petits muscles qui ne sont pas sollicités quand vous gardez vos chaussures. Les chaussures minimalistes peuvent procurer ce même effet quand vous les mettez pour la première fois. Et attention aux fatigues générées et au risque de tendinite à chaque changement de pneumatique. Bien entendu, au-delà du minimalisme et de l’oversize (les 2 ayant leurs qualités propres et ne présentant pas d’incompatibilité !), il faut penser à la rigidité de la chaussure, à son poids (car maximaliste ne rime pas avec lourd !), à son drop, et bien entendu au confort.

balducci

 

Garder un pied réactif !

Il est primordial pour un athlète de conserver une motricité fine de l’ensemble des structures  anatomiques décrites précédemment, soit par son activité sportive, soit par la réalisation d’exercices spécifiques. Avoir un pied réactif diminue le temps de contact au sol et améliore la technique de course. Rappelons qu’une des manifestations de la fatigue est la perte de raideur et l’augmentation du temps de contact. Pour un coureur s’entraînant exclusivement sur route et sur terrain plat, la même pose de pied au sol se répète indéfiniment, avec des mouvements dans les axes verticaux et antéro-postérieur. En trail, en raison de la nature chaotique du terrain, le pied subit des torsions et des pressions dans les 3 directions de l’espace, et la pose de pied au sol va solliciter aussi bien l’avant-pied que le médio-pied ou l’arrière-pied. Les muscles intrinsèques et extrinsèques du pied vont être plus sollicités, la proprioceptivité va être à l’œuvre pour régler la raideur des ressorts tendino-musculaires (la stiffness) à la nature des sols. Bref, le trailer, malgré le port de chaussures, va solliciter activement l’ensemble des zones du pied, le renforcer, et prévenir ainsi les blessures. En trail, des études ont montré que les poses de pied sont très variables. En montée, la pose avant-pied (forefoot) est favorisée. En descente, c’est la pose arrière-pied (rearfoot) qui est majoritaire. A plat, cela dépend de la dynamique de foulée de chacun (forefoot, midfoot ou rearfoot).

Pour autant, et quelle que soit sa spécialité, il est conseillé de pratiquer des exercices pour développer et conserver un pied fort et « intelligent », c’est-à-dire réactif et adaptable. A l’entraînement, il est conseillé de varier les types de chaussures, de la minimaliste à l’oversize, afin de stresser et développer l’ensemble des muscles qui participent à la foulée et à la dynamique du pied au sol et en phase de vol. Pour les phases d’échauffement, de lignes droites et de récupération post-séance, quittez vos chaussures et faites votre récupération pieds nus dans l’herbe ou dans le sable. Au-delà du bien-être de libérer ses pieds, les petites douleurs qui suivront vous révèleront toute la richesse de cette zone que les chaussures privent d’expression.

En variant les types de chaussures, en courant parfois pieds nus sur des terrains adaptés et sur certains temps de la séance, et en pratiquant des exercices spécifiques, l’athlète renforce son pied et sa cheville, éloigne les blessures, devient plus performant sur terrains techniques, et diminue le risque de blessures. Ça c’est le pied !

 

 

Réagissez