JO 2012 : Christelle Daunay, fer de lance du marathon français

Bien dans ses baskets et les pieds sur terre

Recordwoman de France du marathon, Christelle Daunay, 37 ans, vivra ses deuxièmes Jeux Olympiques à Londres cet été. Vingtième à Pékin en 2008, elle vise cette fois le Top 8.

Christelle Daunay

Préparer un marathon olympique, c’est accepter de travailler avec des incertitudes qu’il faudra gérer le jour J. La météo, par exemple. Quel temps fera t-il à Londres, le dimanche 5 août 2012 ? « On part à 11 heures, c’est tard, cela peut jouer sur la température de la course », souligne Christelle Daunay.  « A Pékin, celle qui gagne (la Roumaine Constantina Tomescu, nldr) est partie à peu près à mi-course et avec la chaleur, personne n’a voulu la suivre. Pourtant, c’était parti lentement ». Et de poursuivre : « On ne peut pas savoir à l’avance ce qui va être fait, quelle va être la tactique de chacune. Ca peut partir très vite. Six ou sept filles valent 2h20, elles ont donc de la marge pour finir vite ». Il faudra donc « savoir analyser la situation au moment venu ». Parce que « c’est difficile d’établir une tactique à l’avance. Il faut aviser en fonction de ce que l’on vaut le jour J, et regarder ses propres sensations ».

Les sensations, justement. A cinq semaines de la grande explication entre les meilleures mondiales, elles sont plutôt bonnes pour Christelle Daunay. Après avoir connu le premier arrêt de sa carrière cet hiver, celle qui a choisi depuis 2006 de mettre son activité de kinésithérapeute entre parenthèses, a rempli son « premier des deux objectifs de la saison » : elle s’est approprié le record de France du 10 000 m, lors de la Coupe d’Europe à Bilbao (Espagne)« Les meilleures marathoniennes sont très fortes sur 10 000 m. Certaines ont même de très bons chronos sur 1 500m. Pour aller vite longtemps, il faut savoir aller vite sur des distances plus courtes. Je courais après ce record depuis longtemps, peut-être depuis 2004 ou 2005. C’est quelque part anecdotique, mais je le voulais ». Trois semaines plus tard, lors de la corrida de Langueux, elle est passée tout près du record de France du 10 km. De quoi offrir quelques certitudes : « Ces deux chronos prouvent que j’ai une base de vitesse intéressante. Je suis capable d’aller vite à certains moments du marathon ».

Pour ces Jeux Olympiques de Londres, elle a obtenu sa qualification au marathon de Chicago l’an dernier. « De justesse, à 19 secondes près, alors que j’avais mis toute l’énergie nécessaire ». Mais elle était déjà gênée par cette blessure qu’elle a finalement « traînée un an. Sans savoir ce que j’avais. Mentalement, c’était difficile. Après Chicago, je me suis dit que ne pourrais pas préparer un autre marathon dans ces conditions là. Même dans la vie quotidienne j’avais mal. Aux cuisses, aux fesses. Et puis, mi-novembre, on a trouvé ce que j’avais ». Verdict : rupture partielle des ischios jambiers et trois mois d’arrêt total. « Ca fait tout drôle. On se pose beaucoup de questions. Je me demandais surtout si j’aurais ensuite le temps de retrouver mon niveau pour les JO. Et puis je me suis prise au jeu de la reprise, en commençant par la marche. Je me suis dit que si je prenais le temps de bien faire, je retrouverais mon niveau. Mais c’est vrai qu’au début, on ne regardait pas trop les chronos ! Le plus surprenant peut-être, était de faire du fartlek en marchant ! Mais d’un autre côté, il y avait un côté ludique ».

« Pour batailler, il faudra que je sois en dessous de mon record de France »

« J’ai fait mes premières séances début mars. En avril/mai, je suis vraiment entrée dans ma saison. C’est aussi là que j’ai fait le travail de musculation. Depuis juin, je suis rentrée dans les Jeux. Ma préparation spécifique a commencé après la corrida de Langueux, avec 6 semaines de travail devant moi. Je n’ai plus de compétition programmée, on a augmenté le kilométrage (170 à 180 kilomètres par semaine). Les deux dernières semaines avant les JO, on redescendra progressivement le kilométrage, tout en gardant l’intensité ».

Christelle Daunay dit avoir « retrouvé de la puissance au niveau des cuisses. Ca se voit, j’ai retrouvé une foulée que je n’avais plus depuis… je ne sais même pas quand ! (sourire) ». Aux Jeux de Londres, elle l’affirme : « J’ai les moyens d’être devant pendant la course. Mais il faut que j’arrive en forme. Et pour batailler, il faudra que je sois en dessous de mon record de France (2h24mn22s depuis 2010). En tout cas, il faudra que je l’aie dans les jambes ». Quand on lui demande le chrono qu’elle aimerait, un jour, réaliser, la championne répond « avoir les moyens de viser 2h22. Mais je ne dis pas que je le ferai à Londres. Je ne peux pas le savoir aujourd’hui, ça dépendra de ma forme. Pour le réaliser, je dois être dans un état de forme optimum avec une préparation parfaite. Après, je ne pense pas être capable d’atteindre un jour 2h20 ».

Christelle DaunayCette échéance olympique lui suscite d’autres certitudes : « Il y a du lourd cette année. Ce sera d’un niveau largement supérieur à Pékin. On ne peut même pas comparer. Mais cette fois, je suis prête à prendre des risques. S’il faut faire l’effort de suivre un groupe, je le ferai. J’ai plus d’expérience en marathon. Tous mes marathons (elle courra son neuvième à Londres, ndlr) m’ont appris quelque chose. Même lorsque j’ai fait une attaque toute molle à New-York (en 2009). Après, on m’a dit « Christelle, quand tu places une attaque, il faut que ça se voie, vraiment ! » (sourire) ».

Ces Jeux 2012 seront ses « derniers Jeux ». « J’avais déjà dit ça pour Pékin, concède-t-elle. Mais là, vraiment, ce seront mes derniers. J’ai 37 ans, je vais sur mes 38. Il faut savoir s’arrêter. Mais je ne le ferai pas d’un coup, j’irai progressivement. Tout dépendra de la manière dont j’ai vécu, physiquement et mentalement, ce marathon ».

Son objectif est d’être « finaliste » (dans les huit premières). Un podium ? « Il peut y avoir des défaillances. Les cartes ne sont pas jouées d’avance. Il y a toujours une possibilité de prendre des places, mais il faut aussi être réaliste sur les performances des meilleures ». Première Européenne ? « Chez les femmes, il ne faut pas compter que sur les Africaines. De nombreux pays peuvent prétendre à cette victoire. Le niveau est très dense. Et en Europe, il y a du monde ! En particulier la Russe (Liliya) Shobukhova (record personnel à 2h18mn20s à Chicago en 2011, ndlr). Quant à Paula (Radcliffe, recordwoman du monde en 2h15mn25s, ndlr), elle est certes en méforme, mais ce sera sa dernière course et elle sera chez elle ! Pour être première Européenne, il faudra être costaud. Mais cela reste un peu anecdotique ».

Car une chose est sûre : « Ce que l’on retient, c’est la place. Et uniquement celle qui gagne ».

Christelle Daunay

Née le 05/12/1974 au Mans (72)
Club : SCO Sainte Marguerite Marseille
Recordwoman de France du 10 000 m en 31mn35s81 (Bilbao, 2012) ; du 15 km route en 48mn56s (Reims, 2010) ; du 20 km route en 1h04mn51s (Reims, 2010), du semi-marathon en 1h08mn34s (Reims, 2010) et du marathon en 2h24mn22s (Paris, 2010)

Palmarès

2011
Championne de France de cross
Championne de France du 5 000 m

2009
Championne de France de cross
Championne de France du 10 000 m
Championne de France de marathon

2008
Championne de France du 10 000 m

2007
Championne de France de cross

2006
Championne de France du 10 000 m

2004
Championne de France du 5 000 m
Championne de France de semi-marathon

2003
Championne de France du 5 000 m

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