Sportifs et matières grasses : et si on enterrait la hache de guerre ?

Vous faites partie de ceux et celles qui bannissent les matières grasses pour voir faire fléchir l’aiguille sur la balance et ainsi optimiser vos performances ? Halte là ! Certes, trop de gras nuit à la santé… Mais pas assez, aussi !

« Les matières grasses, ça fait grossir ». Le raccourci est fréquent, qui plus est dans la population sportive et particulièrement des coureurs, où le poids est un facteur de performance. Mais comme souvent, il faut se méfier des raccourcis.

A ceux qui lancent à la cantonade : « la course à pied, c’est mauvais pour les articulations », vous répondez : « tout dépend de l’intensité, du mode de pratique, et de l’équipement utilisé ». Hé bien pour les matières grasses, le raisonnement est similaire. « On diabolise les graisses, parce que l’on pense souvent à des produits – par exemple le Nutella – où elles sont associées à une grosse quantité de sucres », lance Corinne Peirano. Bien consciente que la relation entre lipides et poids obnubilent de nombreux coureurs, la diététicienne nutritionniste (par ailleurs ultra-traileuse) poursuit : « Le surpoids et l’obésité ne s’expliquent pas que par l’apport en matières grasses. Il y a aussi, entre autres, des excès de glucides et des apports énergétiques supérieurs élevés ».

« Admettons. Mais tout de même, un monde sans graisses ne serait-il pas meilleur par la santé ? », interrogeront les plus sceptiques. « Non, les matières grasses sont essentielles à l’organisme » et entrent d’ailleurs dans la composition du cerveau à plus de 50%, répond Corinne Peirano. Outre leur rôle énergétique, elles permettent également de « fixer les vitamines A, D, E et K ». Des vitamines dites liposolubles : autrement dit solubles dans des corps gras.

Quid des lipides avant l’effort ?

Outre les glucides, votre organisme brûle également quantité de lipides durant l’activité physique. D’où l’intérêt d’en avoir suffisamment en stocks.

Toutefois, les « lipides ont tendance à ralentir la vidange gastrique », rappelle Corinne Peirano, diététicienne. « On conseille donc un régime hypo lipidique juste avant l’effort ». Comprenez par là que lors du petit déjeuner qui précède votre épreuve, évitez les viennoiseries, et autres aliments particulièrement chargées en matières grasses.

Quant aux jours qui précèdent votre course, ne faites pas l’erreur de supprimer les lipides qui, on le rappelle, sont indispensables. En revanche « faites encore plus attention à la qualité des matières grasses que vous ingérez ». Plus que jamais, les acides gras essentiels (voir ci-contre) seront vos alliés.

Mais alors pourquoi les autorités sanitaires ne cessent-elles de nous abreuver du célèbre message « éviter de manger trop gras » ? Parce que, bien sûr, il ne s’agit pas de tomber dans l’excès de gras, qui, lui, produit des effets délétères sur la santé. Et surtout, il convient de savoir repérer les « bonnes graisses ». « On ne demande pas aux gens de manger du beurre à la petite cuillère ou de boire un verre d’huile », plaisante Corinne Peirano.

Pour faire simple : ce dont vous avez besoin, ce sont des acides gras essentiels, oméga-3 et oméga-6, que l’organisme est incapable de fabriquer seul et qu’il faut donc « aller les chercher dans l’alimentation ».

Leurs vertus sont nombreuses, mais les oméga-3 ont surtout un rôle anti-inflammatoire, et les oméga-6 renforcent le système immunitaire. Conséquence : si vous en manquez, vous fragilisez votre organisme et augmentez votre risque de blessure. Attention toutefois à ne pas ingérer trop d’oméga-6 par rapport aux oméga-3 pour ne pas provoquer « de déséquilibre et ne pas vous retrouver dans un état inflammatoire latent », explique Corinne Peirano.

Dans la pratique, les oméga-6 se retrouvent principalement dans les huiles type pépins de raisin, soja, maïs ou encore tournesol. Les oméga-3, eux, sont présents dans les huile type colza et noix, mais aussi dans le chanvre, les algues, et les poissons gras. « Et pas seulement le saumon, lance Corinne Peirano. D’ailleurs, je préfère parler de produits maritimes. Ma recommandation c’est d’en manger trois fois par semaine, et de ne pas utiliser de cuisson à haute température pour préserver les oméga-3. Cela inclut les poissons comme le maquereau, les sardines, le hareng, les anchois, mais aussi les coquillages et fruits de mer. Il y a largement de quoi varier les repas ! ».

Rappelons que pour une alimentation saine et équilibrée, deux cuillérées à soupe d’huile par jour sont recommandées. « Pensez à varier vos huiles. L’huile d’olive convient très bien pour la cuisson. Pas les huiles de soja, colza et noix. Sinon, on détruit les oméga-3. Celles là, il faut donc les utiliser pour l’assaisonnement ».

Pensez également aux oléagineux : noix, noix de cajou, amandes, qui peuvent aussi compléter vos apports en matières grasses. « Sans pour autant vous faire grossir, soutient Corinne Peirano. Tout est question de quantité ».

Enfin, privilégiez les produits laitiers demi-écrémés à ceux au lait entier. Et, pourquoi pas, les yaourts au lait de brebis ou chèvre (également demi-écrémés) qui présentent « des matières grasses de meilleures qualité ».

En conclusion : ne culpabilisez pas sur une poignée d’amandes ou sur le fait de cuisiner vos légumes avec de l’huile. Au contraire, vos papilles ne s’en porteront que mieux car « le gras permet également de fixer les saveurs ». Et si vous respectez les quantités préconisées, votre balance n’y verra que de feu. Mais votre tonus, lui, sera bien meilleur !

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