« Si vous devez ne courir qu’un seul marathon dans votre vie, venez à Caen ». Si Yves Martin aime répéter ce conseil, c’est d’abord parce qu’en tant que responsable de l’organisation des Courants de la Liberté, il ne peut que se réjouir de voir le peloton grossir année après année. Mais c’est aussi parce que courir sur les 42.195 kilomètres qui relient Courseulles sur Mer à Caen, c’est comme faire défiler les pages d’un livre d’Histoire.
Peu avant 9 heures, au moment de souhaiter une bonne course aux participants, l’organisateur rappelle donc la portée hautement symbolique de ce marathon. « On doit toujours garder au fond de soi le devoir de mémoire. Je suis ravi de vous accueillir aujourd’hui, mais je pense déjà à l’an prochain où nous fêterons les 70 ans du Débarquement. Venez nombreux pour rendre hommage à nos vétérans ! ».
En attendant, ce dimanche 16 juin 2013, c’est bien la 26ème édition du marathon de la Liberté qui s’apprête à démarrer. Sur la ligne de départ, Olivier confie être « un peu stressé ». Lui qui habite Amiens a choisi la Normandie pour tenter de boucler la distance reine pour la première fois. « Pour le geste, pour tout ce qui a été fait ici. Et aussi pour les paysages ».
Sous un ciel plutôt gris, le peloton s’élance et s’étire rapidement. Des odeurs de marée accompagnent les coureurs dans leurs premières foulées. Place maintenant à une vingtaine de kilomètres à alterner entre villes et campagne normande. La sortie de Luc sur Mer, peu après le 10ème kilomètre, réserve le plus beau point de vue sur la côte de Nacre.
A Ouistreham, les coureurs récupèrent le canal qui va les mener jusqu’à Pegasus Brigde, à hauteur du 23ème kilomètre. Là, devant le Café Gondrée, première maison française libérée en 1944, une cinquantaine de personnes s’échauffent. Elles ont choisi de participer à la première édition du marathon Relais et c’est ici que va s’effectuer le passage de témoin. Marc, un habitué des Courants de la Liberté, attend son acolyte Pascal. « J’habite ici, alors c’est vrai qu’on ne prête plus vraiment attention à la portée symbolique des lieux. Mais ça reste un mythe. On pense à nos anciens, français ou étrangers ».
La deuxième partie du parcours est plus difficile à négocier. Il faut avaler quelques bosses avant de profiter du ravitaillement de la ville de Mathieu (35ème), puis de rejoindre Caen et la ligne d’arrivée à quelques mètres du Mémorial. Médaille autour du cou, Olivia raconte : « Dans les moments difficiles, j’ai pensé à toute l’Histoire de ces lieux. C’est très inspirant ». Cette Anglaise est venue de Londres spécialement pour l’épreuve qu’elle a bouclée en 3h50. « C’était magnifique et les gens qui nous encouragent sont formidables. J’ai visité le musée du Mémorial hier, mais trop rapidement. Je vais essayer de le faire à nouveau avant de partir, sinon je reviendrai ».
Son compatriote Ian, qui habite Chester de l’autre côté de la Manche, avait prévu le coup. « Je vais rester une semaine pour visiter la région. J’ai couru plus de 50 marathons mais c’était mon premier en France, raconte celui qui vient de signer 3h03 à 53 ans. Ici, c’est vraiment spécial ».
Même les locaux avouent qu’il se dégage une atmosphère particulière. « C’était mon dixième marathon de la Liberté, explique Denis, ravi de son chrono de 2h50. Il y avait beaucoup de monde à l’arrivée cette année, c’était vraiment sympa. Et c’est toujours émouvant de courir le long des plages. J’étais là en 1994, en 2004, et j’espère bien être là aussi en 2014 pour les 70 ans du Débarquement ».
« Ce qui m’a marquée, c’est de traverser des villages dont on a entendu parler parce qu’ils ont marqué l’histoire. Ca m’a donné des repères, même si je n’avais jamais couru ici, confie Françoise, première Française de l’épreuve en 3h11. Il faut maintenant que les jeunes continuent à se souvenir de tout cela ».
Un peu plus loin, Cécile, 28 ans, récupère tranquillement après 4h07 d’effort. « Je cherche des parcours jolis, c’est comme ça que je choisis mes marathons. Et j’ai bien aimé ce tracé, même si c’est un petit peloton (1 039 arrivants, ndlr) et que ça manque parfois un peu d’ambiance. Cela dit, quand les gens tapaient dans les mains sur le bord des routes, ça m’a rappelé les images des gens qui applaudissaient les Américains au moment de la Libération. C’était émouvant ».
Emouvants, aussi, ces enfants qui ont accompagné leur papas sur les derniers mètres avant l’arrivée. Et qui, comme Paul, 4 ans, ont pris le micro pour lancer, devant tout le monde, un timide mais sincère « bonne fête papa ! ». « Pour lui, je suis le plus fort des papas !» sourit Julien, finisher en 3h37. « Je suis content, en plus de l’aspect symbolique, le parcours est sympa et l’événement bien organisé ».
Reste maintenant un an à l’équipe des Courants de la Liberté pour préparer la prochaine édition. L’histoire n’est pas encore écrite, mais ce 15 juin 2014 devrait, à n’en pas douter, rester dans les annales…
Les podiums
Marathon
Hommes
1. Peter Chesang Kirui (KEN), vainqueur en 2h14mn38s
2. Babo Musa (ETH), 2h16mn37s
3. Kalid En-Guady (MAR), 2h19mn31s
Femmes
1. Maryna Damantsevich (BLR), vainqueur en 2h36mn01s
2. Jemila Wortesa (ETH), 2h37mn08s
3. Alina Gherasim (ROU), 2h48mn56s
Le classement complet du marathon relais
Semi-marathon
Hommes
1. Alfred Cherop (KEN), vainqueur en 1h03mn47s, nouveau record de l’épreuve
2. Onesphore Nkunzimana (BUR), 1h05mn53s
3. Asfaw Dejene (ETH), 1h06mn10s
Femmes
1. Leonida Mosop (KEN), vainqueur en 1h13mn34s
2. Olga Dubovskaya (BLR), 1h18mn25s
3. Marie-Line Hamon, 1h27mn25s
10 km
Hommes
1. Olivier Galon, vainqueur en 31mn23s
2. Fatah Akhzam, 32mn23s
3. Stéphane Hannot, 32mn35s
Femmes
1. Carmen Oliveras, vainqueur en 34mn59s
2. Olena Serdiuk (UKR), 35mn42s
3. Elodie Navarro, 36mn30s
Quelques photos du Marathon de la Liberté 2013