Nuria Picas, « madame ultra »

Ultra dynamique, ultra passionnée, Nuria Picas attire les superlatifs aussi vite qu'elle avale les kilomètres. A 38 ans, l'Espagnole a survolé l'Ultra Trail World Tour 2014.

Nuria Picas vainqueur des Templiers pour la troisiè-me fois consécutive en 7h51mn46s

« Garde des choses à faire pour une autre vie ». C’est une phrase de sa mère qui résume bien l’emploi du temps de Nuria Picas. A 38 ans, la Catalane, maman de deux jumeaux de 4 ans, vient de remporter la première édition de l’Ultra Trail World Tour. Pas de doute, en 2014, elle a maîtrisé son sujet. Seule ombre au tableau : son abandon sur les championnats du monde de skyrunning (80 km du Mont-Blanc) en juin (voir les résultats). Le reste parle pour elle : trois victoires en trois mois durant le premier semestre : la Transgrancania en mars (voir les résultats), le Mont Fuji en avril (voir les résultats), et The North Face 100 Australia en mai (voir les résultats), puis une deuxième place sur l’UTMB en août (voir les résultats) et enfin un nouveau triomphe aux Templiers fin octobre (voir les résultats). « C’est vrai que j’ai fait une super saison, sourit-elle. J’ai vraiment eu de bonnes sensations. Et je me suis fait plaisir. Pas seulement à courir, mais aussi à découvrir ». Car si on ne compte plus les kilomètres qu’elle a avalés runnings aux pieds, mieux vaut ne pas se lancer, non plus, dans le calcul kilométrique de ses voyages en avion. « Ce n’est pas toujours simple pour la vie de famille, mais c’est ma vie, et j’aime ça. Le séjour en Australie a été le plus court. Une semaine. Finalement, plus que la course, c’est ce qui a été le plus difficile à gérer : la fatigue du voyage, le décalage horaire, … »

Son programme 2015 n’est pas encore définitivement arrêté. Mais elle envisage de découvrir la Nouvelle Zélande et le Tarawera Ultra Marathon, songe à retourner sur la Transgrancania, sera – sauf énorme surprise – de nouveau sur l’UTMB, et n’exclut pas de briguer une quatrième couronne aux Templiers. « On verra, mais il y a certaines courses que j’aime vraiment. Et les Templiers en font partie. C’est là que j’ai gagné mon premier titre « d’ultra trail world champion » en 2012. Ce n’est pas loin de chez moi en voiture, il y a un côté pratique. Et puis c’est magique ».

« Sur les 70 premiers kilomètres, je cours avec mes jambes, ensuite avec ma tête »

Un peu éprouvée par sa longue saison, l’Espagnole explique privilégier actuellement l’escalade. Cette activité qu’elle a découverte enfant, avec ses parents, dans les montagnes de Montserrat qui lui sont si chères. « J’y vais au moins une fois par semaine, j’en ai besoin, je me ressource ». Et de renchérir : « Le sport et la nature font vraiment partie de ma vie. Et ce mixte entre les deux, c’est la montagne, l’alpinisme, l’ultra trail ». Manière d’évoquer cette véritable « tradition catalane » de l’alpinisme qu’elle partage, entre autres, avec Kilian Jornet. Elle envisage, d’ailleurs, de partir dans l’Himalaya « en 2015 ou au plus tard en 2016 ». Mais de là à faire d’elle – comme on le lui dit souvent – la « Kilian au féminin », elle tranche : « C’est touchant d’entendre ça… Mais franchement, non. Kilian est le seul, l’unique ».

Sans chercher de comparaison, Nuria Picas trace sa route. Et réfléchit à de « nombreux projets » dans les montagnes, pas forcément avec un objectif « de records ». Mais elle l’avoue, ce qu’elle aime, c’est « aller vite, courir vite ». Un brin paradoxal pour une coureuse d’ultra ? « C’est vrai… Sur un 100 miles, tu ne peux pas aller aussi vite, c’est trop difficile. Mais d’ailleurs, je préfère les distances proches de 80 kilomètres ».

En évoquant la gestion des longues distances, elle aime répéter cette phrase : « Sur les 70 premiers kilomètres, je cours avec mes jambes, ensuite avec ma tête ». « Je trouve que cela correspond vraiment bien à l’ultra », complète celle qui ne part jamais sans son Ipod sur une épreuve. « Je ne cours pas tout le temps en musique, mais par exemple la nuit, ou quand je me sens fatiguée, que j’ai besoin de penser à autre chose. Dans ces moments difficiles, ça m’aide. Comme le fait de penser à des choses positives, de profiter de l’environnement. Il ne faut pas se concentrer sur la douleur ».

La douleur reste pourtant « incontournable. Mais à la fin d’une épreuve, ce n’est pas à ça que tu penses. Ce dont tu te souviens, c’est d’avoir réussi », lance celle à qui on avait affirmé qu’elle « ne recourrait plus » après un accident d’escalade à 22 ans. Nuria Picas a fait mentir les pronostics et les médecins n’en reviennent pas. « Ils me disent que je suis vraiment forte parce que ma blessure était très sérieuse ». D’ailleurs, sa cheville gauche ne « fonctionne toujours pas à 100% ». Mais sur les chemins, ces derniers temps, ses concurrentes ne s’en rendent pas vraiment compte…

Nuria Picas en bref

Née le 2 novembre 1976
Espagnole

Principaux résultats

2014 : vainqueur de la Transgrancanaria, de l’Ultra Trail Mt Fuji, de TNF 100 Australia, du Salomon 4 Trails, de la Grande Course des Templiers, 2ème de l’UTMB
2013 : vainqueur de la Cavalls del Vent, de la Grande Course des Templiers, 2ème de l’UTMB, du marathon de Zegama et de la Transvulcania
2012 : vainqueur de la Cavalls des Vent, de la Grande Course des Templiers, 2ème de la Transvulcania et du marathon de Zegama

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