L’alternance, ou principe de la diversité !

La semaine précédente, nous avons parlé du principe premier de la progressivité à l’entraînement, et nous avons nommé les autres principes que sont l’alternance, la spécificité, le transfert et l’individualisation. Aujourd’hui, nous allons examiner le principe d’alternance des sollicitations énergétiques et les intérêts de le respecter. Bien entendu, un principe ne remplace pas l’autre et ils doivent être suivis de manière concomitante.

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Article : De la Progressivité, mettez-en partout !

Alterner, ça veut dire quoi ?

L’alternance est un principe à appliquer tant au niveau des intensités que des distances, des durées et des terrains de jeu.

 

Les intensités 

Il s’agit ici du sens premier de l’alternance, celui de la variation des sollicitations bioénergétiques. Cette alternance au sein d’un microcycle doit tenir compte des processus de surcompensation propres à chaque filière sollicitée. En effet, chaque session d’entraînement doit idéalement intervenir au moment où les capacités de travail sollicitées par une séance de même type sont régénérées voire augmentées.

Bien sûr, on peut stratégiquement  travailler une qualité avant que celle-ci ne soit régénérée afin d’accumuler la fatigue et d’obtenir après une phase de repos un phénomène d’hyper-compensation. Ce type de travail doit être encadré et évalué afin d’éviter le surentraînement.

Les vitesses de récupération et de compensation étant différentes selon la filière sollicitée, il faut alterner les types de séances au sein d’un microcycle afin de pouvoir cumuler de plus grandes charges pour un même ressenti d’effort. Un travail en vitesse n’altère les capacités aérobies que quelques heures, de même qu’un travail aérobie ne déprime les capacités de vitesse que pendant 5 à 6 heures, alors que la fatigue parasympathique due à l’accumulation de longues charges aérobies peut s’installer pendant 2 à 3 jours.

La succession des séances est donc déterminante : si on associe 2 séances à objectif identique, la deuxième ne pourra se faire à la même intensité que la première, et la fatigue produite va épuiser les capacités de la filière. Le temps de récupération nécessaire à la surcompensation sera augmenté et le risque de surfatigue accru ; si on associe 2 ou 3 séances à objectifs différents et à 24h d’intervalle chacune, chaque séance pourra être menée à une intensité élevée avec une fatigue générale maîtrisée. Bien entendu, il faut tenir compte du niveau d’entraînement de l’athlète et de ses capacités d’adaptation physiologiques et psychiques au moment considéré.

 

Les distances 

Elles sont en lien bien entendu avec l’intensité de travail si on se réfère à la notion d’endurance (décroissance de la vitesse en fonction de la durée ou de la distance). Si les séances longues sont indispensables pour les adaptations périphériques et centrales mises en jeu, les séances courtes sont également utiles à visée de récupération ou d’assimilation de séances qualitatives intenses. La durée de la séance se programme également selon ses disponibilités et selon la capacité de récupération qui va suivre. Ainsi, pour la grande majorité des pratiquants, il est plus facile de placer une séance de 2 à 3h le week-end qu’en semaine.

 

Les terrains de jeu

L’alternance des terrains d’entraînement est à mettre directement en lien avec l’indice de monotonie, car la diversité s’intéresse autant au psychologique qu’au physique.

 

Un indice pour mesurer la diversité de votre pratique

Le physiologiste Carl Foster a proposé une méthode simple et rustique pour quantifier les charges d’entraînement (Charge = durée d’effort en minute x RPE (= Ressenti d’effort sur une échelle de 1 à 10)). Il est allé plus loin en permettant le calcul de la monotonie qui tient compte des durées et des ressentis au sein d’un même microcycle. Enfin, il a proposé le calcul de la contrainte, produit de la charge par la monotonie. Ainsi, plus l’entraînement est varié, plus la monotonie est faible, et plus la contrainte est réduite ; la contrainte pouvant être considérée comme le véritable impact de l’entraînement sur l’organisme tout entier.

 

 

L’alternance et la diversité peuvent également se concevoir à l’échelle de la saison. Toutefois, la spécificité des différentes compétitions fait que cette alternance doit être limitée dans le temps. Ainsi, beaucoup de traileurs débutent leur saison soit par une activité croisée (ski alpinisme par exemple), soit par les cross et un objectif sur la route (semi ou marathon). Les intérêts sont multiples et se basent notamment sur un autre principe de l’entraînement : le transfert, dont nous parlerons prochainement. Ces principes sont bien entendu valables à l’échelle pluriannuelle et sont souvent ressentis comme un besoin chez les coureurs, et à fortiori chez les ultra-traileurs.

En conclusion, l’alternance des sollicitations énergétiques et des modes d’entraînement doit se concevoir comme une mesure prophylactique et à visée de performance. C’est la voie idéale pour progresser, entretenir la motivation et éviter la blessure. En trail, ce type de fonctionnement est facilité par la grande diversité des facteurs de performance à travailler. A bien y réfléchir, on a peu de chances de s’ennuyer si on veut être à la fois rapide, endurant, technique et stratégique.

 

2 réactions à cet article

  1. Bonjour
    Qu’est ce qui explique la fatigue dans l’effort d’endurance visant la performance d’un cycliste CLM de 1 heure ou d’un coureur de 21.1 km, niveau élite?
    On sait maintenant que ce n’est pas l’accumulation d’acide lactique,
    Comment s’explique le déclin de la capacité à maintenir l’intensité, ce n’est pas l’acide lactique ni le manque de glycogène?
    Qu’est ce qui fait qu’un athlète peut maintenir une PMA ou de sa VMA de 80% pendant par exemple 90 minutes mais pas pendant 2 heures?
    J’ai beau chercher je ne parviens pas à trouver d’écrit de recherches scientifique sur le sujet, Connaissant votre intérêt marqués pour la science et l’entrainement cardio j’aimerais savoir ce que vous en pensez???

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  2. Bonjour, vos questions sont intéressantes mais les réponses sont complexes et diverses. Tout d’abord la fatigue est multifactorielle et les approches par l’acidose et la déplétion du glycogène sont insuffisantes, c’est vrai. Il faut envisager la fatigue (via les travaux de Guillaume Millet entre autres) comme un dysfonctionnement au niveau du déclenchement de l’action musculaire, du cerveau jusqu’au muscle. Les sites potentiels de la fatigue sont innombrables et ils concernent soit la fatigue centrale (cerveau jusqu’à la jonction neuromusculaire) soit la fatigue phériphérique (au delà de cette jonction).
    Sur un semi, la perf ne va dépendre directement des réserves en glycogène, mais va dépendre tout de même du seuil d’accumulation des lactates, en lien avec l’indice d’endurance et également la VMA/PMA. Ces 3 facteurs de perf sont reliés entre eux et dépendent de données génétiques mais aussi de l’entraînement.
    Votre 2ème question rejoint la première. C’est un fait que la vitesse de course décroit avec la durée, et vous avez raison d’en rechercher les causes. Là aussi, on peut parler de FATIGUE, dont les causes sont multiples : fatigue centrale (dépression du système adrénergique), déshydratation, inflammation (CPK, CRP…), acidose musculaire, contraction musculaire moins efficace, baisse de la stiffness (= augmentation du temps de contact), perte de force au niveau des extenseurs du genou et des fléchisseurs plantaires…

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