Depuis une décennie, les trails urbains font recette en accueillant toujours plus de coureurs. S’ils peuvent servir avantageusement de préparation aux courses estivales, ils deviennent également des objectifs à part entière et attirent l’élite française. Voyons comment s’y préparer.

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Une fois évacué le débat stérile sur la réalité ou l’intérêt d’un trail en ville, intéressons-nous aux particularités de ces épreuves qui attirent la foule à Lyon, Nantes, Saint-Etienne et sur l’ensemble du territoire. Les organisateurs ont à cœur de faire découvrir leur cité en empruntant un maximum de passages insolites : ruelles, ponts, quais, collines, escaliers, passages souterrains … pour au final proposer des parcours irréguliers, accidentés, difficiles, et bien différents des tracés nature.

Par conséquent, la gestion de ces épreuves s’avère plus difficile qu’il n’y paraît.

Pour les coureurs sur route qui s’essaient au trail urbain, la vitesse de progression n’est plus seulement proportionnelle à la distance mais également au dénivelé et à la technicité. Les repères de vitesse s’effacent, la marche peut devenir une stratégie de progression et non plus un abandon. Les montées sèches demandent une puissance qui fait souvent défaut car quand on ne rebondit plus, il faut bien pousser ! Les descentes ne sont pas simples non plus, souvent techniques dans les escaliers et toujours traumatisantes pour la charpente musculo-tendino-squelettique. Bref, le passage de la course sur route au trail urbain est complexe. Moins long en kilométrage sur le papier, le Lyon Urban Trail (36 km et 1500m de dénivelé) se révélera bien plus difficile et plus long en temps que le marathon de Lyon (42km pour un dénivelé nul) pour les raisons évoquées précédemment auxquelles il faut rajouter l’autosuffisance alimentaire qui impose le port d’un matériel dont le poids est toujours néfaste à la vitesse de progression.

Pour les traileurs expérimentés, le passage du trail de montagne au trail urbain n’est pas simple non plus. La nature du terrain et celle des difficultés changent. L’accroche n’est plus au programme, la foulée doit devenir efficace sur sol dur, et la répartition du dénivelé global est très différente. En ville, les montées et descentes excèdent rarement les 50m de dénivelé, l’altitude est donc basse et constante, la température invariable durant l’épreuve.

(Profil du Trail du Ventoux et du Lyon Urban Trail)

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S’il est facile de trouver son rythme (équilibre respiratoire et musculaire) dans une longue montée, il est plus délicat de gérer une répétition de petites côtes assassines, qui plus est dans les escaliers.

 

Gestion et préparation

Une fois la course analysée : distance, dénivelé global, répartition des bosses et ravitaillements, il faut trouver les bonnes réponses. Commençons par évaluer le temps de course. En trail, on a l’habitude de dire que 100m de D+ = 1km de temps d’effort supplémentaire. Dans notre exemple, le Lyon Urban Trail passe virtuellement de 35 à 50 km. A 12 km/h à plat, ce qui est déjà excellent, le temps de course augmente de 1h15. A 10 km/h, vitesse moyenne tout à fait honorable, il faudra prévoir 1h30 de course supplémentaire par rapport à la même course à plat. C’est ce temps de course global qu’il faut prendre en compte pour estimer l’intensité de son effort. Cette intensité est très subjective et constitue un facteur de performance incontournable. Pour un trail urbain d’une quarantaine de kilomètres, atteindre les 80% serait une belle performance. Comment évaluez ce pourcentage ? Tout simplement en calculant sa fréquence cardiaque de réserve. Pour un athlète battant au repos à 60 et en maximal à 180 pulsations, la FC réserve est de 120. A 80%, cet athlète atteint les 120 x 80% + 60 = 156 battements par minute, barrière à ne pas dépasser. En trail urbain, beaucoup de néophytes flirtent avec leur fréquence cardiaque maximale à l’issue de la première rampe d’escaliers, la suite devenant un long chemin de croix.

Avant de parler de préparation aux montées d’escaliers, voyons pourquoi c’est si difficile de les grimper. Si nous devions emprunter une route goudronnée montant parallèlement aux escaliers, le pourcentage serait hallucinant. Les marches permettent de conserver un appui à plat et le buste perpendiculaire à la marche. Mais à chaque marche, il faut hisser et déplacer son centre de gravité, ce qui demande une production de force importante puisque le déplacement vertical est au moins aussi important que le déplacement horizontal. Le déploiement de force au niveau des membres inférieurs, principalement les quadriceps, fait intervenir les fibres dites rapides, qui ont le désavantage de se fatiguer plus vite. C’est pour cela qu’une première montée d’escaliers avalée 2 par 2 en force/vitesse peut rapidement brûler les cuisses et contraindre à la marche dans la montée suivante.

 

Premier conseil : le pacing ou gestion régulière de l’intensité de l’effort. On garde l’œil sur son cardio, on laisse les autres s’emballer dans les premières rampes et on recherche la bonne stratégie. Si l’on est assez entraîné, on peut faire comme ces coureurs de montagne qui grimpent tranquillement marche par marche, avec 2 avantages : on conserve de l’énergie élastique gratuite que l’on réinvestit dans le pas suivant, et on produit moins de force. Jusqu’à la dernière montée, ces fins stratèges sont capables de courir là où les autres marchent depuis longtemps, s’accrochant désespérément à la rampe pour ne pas reculer. Si l’on est moins entraîné, on peut choisir la marche rapide en s’aidant de la rampe au besoin pour soulager le travail des membres inférieurs. Finalement, c’est le cardio qui décide car chez les experts, les fréquences cardiaques en côte ne dérivent pas. Le coureur qui gère est capable de relancer immédiatement au sommet pour retrouver son rythme à plat, alors que celui qui a présumé de ces forces éprouve beaucoup de difficultés ventilatoires et musculaires.

Bref, vous l’avez compris, plus que dans toute autre épreuve, la gestion est essentielle sur les trails urbains et conditionne la performance de chacun.

Gérer ou exploser : le choix paraît simple. Photo site web Lyon Urban Trail
Gérer ou exploser : le choix paraît simple. Photo site web Lyon Urban Trail

 

Deuxième conseil : la préparation ; Un trail urbain demande une préparation générale et spécifique. Pour s’en rendre compte, rien ne vaut la pédagogie par l’exemple. Allez repérer le parcours et enchaînez les premières difficultés pour prendre la mesure de ce qui vous attend.

Ensuite, préparez-vous quelques mois avant l’épreuve, en général comme en spécifique, avec 3 types de séances facilement réalisables : séances de renforcement musculaire à la maison ou en salle, séances d’endurance musculaire qui mêle course et renforcement, séances spécifiques dans les escaliers. Bien entendu, ces séances doivent s’intégrer dans la préparation globale à base de course et de disciplines croisées (VTT, vélo, ski de fond, ski alpinisme… selon vos possibilités et la saison). Profitez également des reconnaissances organisées par les magasins Lepape.

Pour bien profiter des trails urbains, prendre du plaisir et maîtriser le parcours, il faut se préparer avant et gérer pendant. 2 mois de préparation spécifique sont nécessaires et une reconnaissance du tracé et de ses pièges est un atout majeur. En respectant ces conditions, place à la griserie et la magie de la course hors sentiers battus.

La semaine prochaine, nous détaillerons les séances de préparation aux trails urbains.

 

 

 

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