D’une attaque talon à une attaque avant-pied : fausse bonne idée

En raison du nombre important de foulées réalisées par un coureur, la mécanique de pose du pied au sol est un facteur de blessure considérablement étudié.
On retrouve notamment souvent la même question : les coureurs ont-ils raison de chercher à ne plus attaquer par le talon ?

Plusieurs facteurs peuvent inciter à changer sa foulée vers une attaque avant-pied ou médio-pied. Parmi eux, on trouve la pose du pied par le talon, statistiquement associée à un risque plus élevé de blessure en running.

De même, de nombreux coureurs élites utilisent un pattern de pose médio- ou avant-pied. Ou encore, les retours de coureurs indiquent qu’un changement de foulée vers le médio- ou l’avant-pied est capable de réduire les douleurs au genou en cas de blessure.

 

Néanmoins, ces arguments rencontrent des obstacles. Par exemple, face à la corrélation attaque talon-blessure, on peut rétorquer que l’écrasante majorité des coureurs de distance possède une pose par le talon (95,1% sont « talon » ; 4,1% sont « médio-pied » ; 0,8% sont « avant-pied »). De même, si les élites ne posent pas le talon c’est notamment en raison de leur vitesse de course élevée et non par intention ; et l’atténuation de la douleur en cas de transition de foulée n’est que ponctuelle, avant que d’autres maux liés au changement de foulée ne se révèlent.

 

Dans ce débat le changement de pattern de pose du pied vers une attaque médio- ou avant-pied, est devenu une stratégie communément promue lors de la tentative de prévention et de gestion des blessures des coureurs d’endurance.

Pourtant, lors de la transition vers ce type de foulée, des changements biomécaniques importants se produisent. Certes cette étape peut permettre de réduire la pression sur le genou, mais à l’inverse, le pied, la cheville et la partie inférieure de la jambe subissent une augmentation rapide de charge.

 

D’un point de vue scientifique, l’intérêt d’une pose de pied autre que par le talon n’est pas soutenu. En effet, un manque de preuves existe pour supporter cette idée. D’après une récente méta-analyse de 53 études comparant les modèles de pose du pied au sol, on observe ainsi que :

– concernant les blessures, aucune preuve ne liait un type spécifique d’attaque du pied avec un risque accru ou réduit de blessures futures,

– en ce qui concerne l’économie de la course, il n’y avait pas de différence entre les coureurs talon et les autres coureurs,

– toujours sur l’économie de course, la transition vers une pose du pied vers une pose avant-pied pouvait même nuire au coureur à court terme.

 

Autrement donc que de souhaiter progresser par un changement de foulée, il est préférable pour le coureur d’utiliser des interventions plus sécures et plus efficaces.

Par exemple, l’entraînement à la marche peut permettre de réduire la force de réaction verticale du sol et donne des résultats positifs sur le risque de blessure du coureur.

De même, le renforcement musculaire régulier améliore sensiblement l’économie de course, la vitesse de sprint et la performance d’endurance. Le renforcement est aussi généralement connu comme un outil de prévention des blessures en sport.

 

Dans ce contexte, le message à retenir serait le suivant : compte tenu du manque de preuves à l’appui, le changement de pattern de pose du pied au sol, d’une attaque talon vers une attaque avant-pied, ne peut pas être recommandé pour un coureur non blessé.

Ceux qui envisagent une telle transition devraient le faire en sachant que cela peut s’avérer inefficace sur la prévention des blessures, la performance, et même générer plus de douleurs sur les zones du corps nouvellement chargées (pieds, chevilles).

 

Running avant-pied

 

Sources : Alexander, Willy, Napier et al., BJSM 2020 ; Anderson, Bonanno, Hart et al., Sports Medicine 2019

8 réactions à cet article

  1. Je viens de lire cette info mais j’ai des doutes que attaquer talons ce soit bon car j’ai une athlète qui attaque talon mais elle a des douleurs à la hanche,genou,dos et cheville.Quand j’observe le ralenti sur caméra de sa foulée,je vois qu’avant que n’ait posé son pied sur le talon,l’autre jambe n’ est pas au sol et tout le poids du corps sur le talon car sa foulée est trop longue.Quand elle court comme ca,sa cadence est de 168 pas mn et quand elle fait l’effort d’attaquer avec le devant du pied et donc elle est obligée de raccourcir sa foulée et la cadence est de 174.Préconisé 180 plus ou moins 10.

    Répondre
    • Bonjour, je suis tout à fait d’accord avec votre commentaire. Je forme des jeunes en athlétisme, on revient sans cesse sur la cadence de 180 mini, la posture droite et le relâchement. Les 3 règles de base pour apprendre à courir.

      Répondre
  2. Bonjour,
    Je suis un sportif amateur de course à pied, réalisant 3 à 4 sorties semaines adepte de fartlek et de longue distance ( semi et marathon), ma pose pied au départ de mes entraînements était talon, je courais fut un temps avec des saucony de drop 8 et 12 , chaussures neuves foulées artificielles non adaptées à mon physique ( 1,98 m pour 84 kg) .Premier constat au bout d une année usure des chaussures ,normal, mais j ai commencé à ressentir des douleurs au niveau des mollets, hanches et lombaires, et on m a conseillé de changer de chaussures. Depuis je cours toujours mes distances favorites, mais j’ai changé de position de pied et actuellement je cours avant pied avec des chaussures minimalistes, j’ai mis 1 an progressivement pour changer ma position, plus de douleurs sur les hanches, les lombaires, j’ai retrouvé la sensation de liberté. Conclusion on doit écouter et connaître son corps avant tout.
    Cordialement.

    Répondre
    • Complètement d’accord avec Rémy.
      J’ai réappris à courir à 45 ans après une opération pour double hernie discale en partie causée par une jambe plus courte (ILMI 1 cm). Mes disques sont bien endommagés et on m’a conseillé de stopper totalement la course.
      Contrairement à ce que préconise la littérature médicale sur les ILMI, que tous reprennent comme postulat sans rien remettre en cause malgré les énormités affirmées (il paraît qu’avec une jambe plus courte de 10 mm il n’a pas de différence de hauteur ; mes disques font beaucoup moins que 10 mm d’épaisseur), j’ai commencé par compenser totalement l’inégalité, après différents tests de hauteur de compensation (merci à Thion Médical pour la qualité de leurs semelles précises au mm) :
      Le fait d’avoir un bassin enfin stable est une sensation que je n’avais jamais connue, et cela a résolu la plupart de mes douleurs cervicales et lombaires.
      J’ai également changé de chaussures, abandonnant les gros amortis avec des drops à 12mm qui modifient artificiellement la foulée et obligent à attaquer par le talon.
      Je cours 3-4 fois par semaine maximum 1h30 par séance, avec des drops de 6 à 8 mm actuellement et je vais encore descendre.
      Le résultat est une attaque avant pied ou médio pied et je me rends compte que l’amorti sur les chaussures ne sert pas à grand chose quand on ne court plus sur le talon.
      1 an et demi après ce changement de foulée, je n’ai eu aucune douleur musculaire ou articulaire, aucune blessure et une sensation de fluidité en courant.
      Je ne suis pourtant pas un coureur léger (1,80m pour 75kg) et j’arrive encore à avancer malgré mes antécédents médicaux et mon âge (18’30 » au 5000m la semaine dernière).
      Il faut se réattribuer l’usage des 28 os et 27 muscles du pied endormis par les chaussures à gros drop utilisées depuis des années.

      Répondre
  3. Bonjour,
    Je suis d’accord avec tous ces points de vue. Comme beaucoup d’entre nous, j’ai souhaité faire évoluer ma foulées vers l’avant et cela n’a pas entrainé immédiatement une diminution/disparition des difficultés (dans mon cas, tendinite du talon d’achille). Par contre, du moment que j’ai commencé à introduire une phase de relachement de la cheville dans mon cycle de course, toutes les douleurs ont disparu.
    Je crois donc qu’il est intéressant d’avoir une foulée avec une « certaine » amplitude qui permette d’obtenir ce relachement temporaire au cours du cycle et de ne pas bloquer la cheville dans une position défensive, rigide. D’autre part, il est indispensable d’avoir ce fameux « bon pied » pour amortir l’impact au moment du retour sur terre, ce que l’on sent très bien comme un travail qui se propage jusqu’à la hanche…

    Répondre
  4. Courir en attaque talon est une ineptie totale. C’est le drop élevé des chaussures qui provoque l’attaque Talon et l’attaque Talon est mécaniquement traumatisant puisqu’il provoque des chocs au genoux, aux hanches et au dos avec à terme des blessures. Je courrais ainsi il y a 4 ans et mes tendons d’Achille s’enflammaient régulièrement. J’ai depuis fait une transition très progressive et je n’ai plus aucune blessure depuis que je courre Médio-Pieds. Les 180 pas par minute sont une règle d’or lorsqu’on court en medio-pieds. Pour ma part je coure en five fingers et/ou chaussures minimalistes au drop proches de 0. Je ne reviendrai jamais à une foulée Talon qui ne sera que source de nouvelles blessures. La course medio-pieds est naturelle, les enfants courent de cette manière mais nos chaussures de ville et de sport moelleuses rendent nos pieds paresseux et faibles. Le plaisir de courir medio-pieds en chaussures minimalistes est également incomparable. Cette technique de course devrait être enseignée dès le plus jeune âge et la meilleure façon d’apprendre est de courir pieds nus. Essayez de courir pieds nus en attaque Talon et vous n’irez pas loin, nous ne sommes pas conçu pour courir attaque Talon et c’est les vendeurs de chaussures amortissantes qui nous forcent à le faire.

    Répondre
    • Tout à fait d’accord, à la naissance les premiers pas d un bébé sont sur l avant pied, à méditer, bienvenue à la liberté de courir, moi aussi je cours en fivefingers, c’est que du plaisir !!!!

      Répondre

Réagissez