Confiné, mais toujours performant

Seulement une semaine écoulée et le confinement nous a déjà bien impacté. Notre comportement sportif, nos sensations à l’effort, les inquiétudes sur la baisse de performance… Pourtant ce n’est que le début. Alors comment préserver un bon niveau d’efficacité les prochains jours/semaines ?

Dans ce confinement, il est autorisé de s’entraîner en extérieur. Bien qu’en faveur de notre santé physique, et débattue, cette autorisation frustre également.

Comme un boulimique devant un morceau de pain, tout sportif assidu se trouve vite excédé par les conditions de proximité au domicile. Et pour causes :

 

  • Le temps et la distance d’entraînement en extérieur sont restreints
  • L’isolement amplifie la sensation d’effort 
  • La monotonie précipite l’impression de fatigue
  • Bref, le confinement devient un facteur de désengagement

 

Dans ce contexte, c’est vrai que l’on peut aisément maintenir les 75 minutes d’activité physique vigoureuse recommandées par semaine (70%-85% de la FC de réserve). Mais légitimement, on peut aussi s’inquiéter de notre niveau d’entraînement. Surtout si les volumes et intensités des séances étaient élevés d’habitude.

 

En fait, si les sportifs suivent vraiment les conditions du confinement sans compenser par une pratique indoor, il est probable que le *désentraînement* touche les plus assidus d’ici une dizaine de jours.

 

Pas la 1ère semaine du confinement, en effet, car on sait qu’une séance HIT et/ou une séance de musculation réalisées par semaine permettent de préserver les qualités physiques acquises (à condition de continuer un minimum les autres sessions d’endurance).

 

Peut-être pas la 2nde semaine, puisque l’on sait qu’un affûtage type s’étale sur cette durée et permet alors de surcompenser (les moins assidus d’entre nous seront toutefois peu à peu affectés).

 

Mais à partir de la 3e semaine. Car la baisse prolongée de volume et/ou d’intensité devient alors suffisante pour que l’organisme ne considère plus cette période comme du repos mais qu’il se *désadapte* peu à peu du stress d’exercice

 

Et, pour enfoncer le clou, ce confinement risque de ne pas être circonscrit aux 2 petites semaines annoncées…

 

Dans cette perspective, quelles conséquences potentielles ?

  • Perte d’efficacité, donc baisse de motivation et de confiance en soi
  • Frustration inconsciente, multiplication des conflits à la maison
  • Prise de poids, par le déséquilibre entre calories ingérées / dépensées
  • Blessure, par la reprise compensatoire d’un entraînement habituel à l’issue du confinement

 

Pour certains, la question d’une dose d’entraînement suffisante peut donc s’avérer cruciale. C’est en ce sens que cet article a été rédigé.

 

Avant de continuer, il faut d’abord rappeler la recommandation propre au COVID-19 d’exercices réalisés à basse intensité (<80% FCmax). Celle-ci vise autant à préserver nos fonctions ventilatoires que cardiaques dont l’atteinte par le virus pourrait être masquée au repos et exacerbée à l’exercice.

 

Au regard de la période d’incubation énoncée du virus de 2 semaines, il conviendrait alors d’adopter ce comportement tant que l’on n’est pas garanti de sa propre immunité et de celle de son environnement. 

 

En revanche, passée cette étape, si votre état de santé le permet, que l’intensité progressive de l’exercice est bien tolérée et que l’objectif est clairement de préserver une charge d’entraînement difficilement atteignable sans sortir longtemps, alors rien se semble empêcher le regain d’intensité d’entraînement.

 

Et pour cela, il existe bien des astuces tout en respectant les conditions du confinement !

Dans le jargon scientifique, on dit que ces astuces augmentent la charge d’entraînement *relative* mais pas la charge *absolue*. Autrement dit, elles permettent de solliciter plus fortement le corps sans même changer la durée / l’intensité de l’effort.

Par conséquent, en situation de « restriction sportive », ces outils favorisent le maintien de nos qualités physiques tout en s’entraînant moins que d’habitude. En tout cas c’est l’objectif sur le papier, et cela fonctionne très souvent dans la réalité. À condition bien sûr de savoir s’écouter et se gérer.

 

D’un point de vue pratique, enfin, retenons que ces propositions devraient être utilisées isolément d’abord, puis combinées seulement à mesure que vous vous y adaptez. Cela permettra de continuer à amplifier l’efficacité de vos entraînements.

 

 

Chaud devant !

 

Le premier moyen est la chaleur ambiante. En effet, lorsqu’il est placé en état d’hyperthermie (sans parler de fièvre), notre corps met en place des mécanismes compensatoires pour se rafraîchir, ce qui stimule ses différentes fonctions à des valeurs inhabituelles. 

 

  • Astuce 1 : s’entraîner dans une pièce chauffée  

Exemple de séance : 60min de cross-fit ou home-trainer dans sa salle de bain chauffée à 35°C

+ : l’effort cardiaque est amplifié

+ : la sensation d’effort est accrue

+ : la déshydratation est prononcée

+ : pour les séances de musculation/cross-fit, l’hypertrophie du muscle est favorisée

– : l’intensité d’exercice est réduite, donc les muscles travaillent moins fort au total

– : la fatigue s’installe plus vite, donc revoir ses intensités à la baisse

– : le sommeil de la nuit suivante peut être affecté, donc privilégier ces séances en matinée

 

  • Astuce 2 : se couvrir pour courir

Exemple de séance : 30 min de running/home-trainer, à bonne allure avec k-way, jogging, gants et bonnet

+ : la sudation est abondante, donc la pompe cardiaque est intensifiée

+ : la sensation d’effort est accrue

+ : après 15’ seulement, l’allure devient difficile à conserver

– : on ne brule pas plus de graisses en étant couvert, contrairement à l’idée reçue

 

La chaleur est normalement un outil d’entraînement utilisé avant une compétition. La chaleur offre en effet de nombreux bénéfices physiologiques qui, dans le contexte actuel, peuvent nous servir pour compenser les effets du manque d’entraînement sur la fonction cardiaque notamment.

 

 

Inspire… Expire…

 

La ventilation est la première étape de l’approvisionnement de nos muscles en oxygène. Partant de ce constat, 3 astuces peuvent être considérées dans notre quotidien.

 

  • Astuce 1 : l’hypoventilation à l’exercice (ou retarder l’inspiration)

Exemple de séance : 20min à bonne allure en alternant 2 temps d’inspiration / 5 temps d’expiration

+ : on simule le même effet qu’en altitude (moins d’oxygène dans le sang)

+ : 5-6 séances suffisent à dégager des bénéfices

+ : on supporte finalement mieux la répétition d’efforts lactiques 

– : il faut bien rester concentré pour contrôler sa respiration

– : l’allure doit être supérieure au seuil ventilatoire pour être efficace (ie, une ventilation nettement accélérée)

 

  • Astuce 2 : les training mask

Exemple de séance : 30min à bonne allure ou 20min à haute intensité

+ : ils renforcent les muscles inspiratoires, ce qui aide dans les épreuves d’endurance

+ : la sensation d’effort est accrue

– : ils ne fonctionnent pas contre le COVID19

– : ils n’entraînent pas d’hypoxie, contrairement aux idées reçues (le niveau d’O2 dans l’air inspiré reste trop élevé pour générer une hypoxémie suffisante)

– : ils créent une hypercapnie (on ré-inspire le CO2 expiré, ce qui entraîne une hausse du CO2 dans le sang) et donc des vertiges, une perte d’intensité

 

  • Astuce 3 : la cohérence cardiaque

Exemple de séance : 5-10min dans les 30min après l’entraînement

+ : elle favorise l’équilibre des systèmes nerveux en récupération

+ : elle peut limiter l’effet fatigue d’une séance éprouvante 

+ : elle est facile à réaliser (si l’on trouve un endroit calme dans la maison…)

– : les premières séances peuvent être plus difficiles (déconcentration, possible mal de tête)

 

En modulant la manière dont on respire, on est capable d’optimiser certaines fonctions physiologiques, comme le niveau d’O2 dans le sang. Ces fonctions pourraient d’ailleurs être complémentaires à celles améliorées par la chaleur (bien qu’il n’y ait pas encore consensus). Le contexte actuel de confinement offre alors l’opportunité de valider cette hypothèse sur notre propre performance.

 

 

L’enchaînement de séances

 

Le tout vaut plus que la somme des parties, on le sait. À l’entraînement, ce concept prend tout son sens lorsque les séances interfèrent, c’est-à-dire qu’elles sont planifiées de sorte à dégager des adaptations supérieures.

 

  • Astuce 1 : enchaînement de séances sur plusieurs jours

Exemple de séances : 4 jours consécutifs avec 1 HIT par jour (eg, 10x5min à intensité soutenue sur rameur)

+ : on épuise largement les stocks musculaires de glucides

+ : on empêche volontairement le corps de récupérer

+ : on crée une fatigue résiduelle avec laquelle il faut combiner les autres jours

+ : on a un objectif concret (et en ce moment, c’est important !)

– : il faut écouter son corps, observer son comportement, jauger ses limites

– : changer de discipline si les muscles/tendons souffrent trop (eg, les 5 premières séries en running + les 5 dernières séries sur home-trainer)

 

  • Astuce 2 : enchaînement sur 2 jours : la fameuse stratégie *Sleep-Low*

Exemple de séances : 1 séance HIT le soir + dîner sans glucides + 1 séance à-jeun au matin

+ : on brûle largement les réserves de glucides, obligeant le corps à fonctionner ensuite avec nos graisses

+ : on profite du temps de la nuit pour que notre corps se transforme

+ : on améliore globalement l’utilisation des graisses à l’exercice

– : accepter de ne pas manger de glucides le soir (salade, fromage, viande…)

– : accepter de s’entraîner le 2e jour avant de prendre son petit-déjeuner

 

  • Astuce 3 : enchaînement le même jour : la stratégie *Train-Low*

Exemple de séance : 30min de home-trainer HIT + repas sans glucides + 30min d’endurance

+ : on apprend aux muscles à mieux utiliser nos graisses plutôt que les glucides 

+ : on favorise la fonte de la masse grasse

+ : l’ingestion d’une grande tasse de café 45min avant chaque séance améliore leur efficacité

– : la seconde séance est plus difficile que la première

– : un effet fatigue peut persister 12-24h après le second entraînement.

 

  • Astuce 4 : enchaînement le même jour : entraînement + chaleur

Exemple de séance : 30min de HIT + 30min de bain chaud

+ : on prolonge la stimulation du cœur tout en restant au repos

+ : on acclimate l’organisme, il supportera donc mieux la chaleur à l’exercice ensuite

– : ne pas se forcer à rester longtemps dans le bain en cas de vertiges

– : sans baignoire, c’est compliqué

 

  • Astuce 5 : enchaînement le même jour : endurance + renforcement

Exemple de séance : 30min de running à allure soutenue + 1h de renforcement du bas du corps.

+ : dans cet ordre, la qualité de la foulée n’est pas impactée par la fatigue

+ : le renforcement permet d’accentuer la signalisation cellulaire de la filière aérobie 

+ : la fatigue musculaire peut devenir comparable à celle d’une longue séance d’endurance 

– : la séance de renforcement est plus difficile à réaliser

 

Enchaîner ce type de protocole posent généralement peu de problèmes sur 2-3 jours. En revanche, sur une période prolongée, il est conseillé de rester très attentif à son niveau de fatigue et ses sensations musculaires pour éviter une surcharge dont les effets pourraient se prolonger au-delà de l’arrêt du confinement.

 

Bon courage

 

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