Le travail de sprints : progression assurée sur longue distance !

La base de tout programme d’entraînement pour un sportif d’endurance, quel que soit sa distance ou sa discipline sera de réaliser majoritairement des séances dites énergétiques. Sorties aérobie, longues, au seuil, fractionnés courts ou longs, il y aura de quoi faire son marché. Peu, finalement, y intégreront des sprints, logique à la vue de la durée des disciplines. Et pourtant, ces derniers pourront être un formidable levier de progression. Explications !

Les principales adaptations que vous viserez par vos entraînements, seront le plus souvent physiologiques.

 

Par exemple, au travers de vos séances fractionnées plus ou moins longues autour de VMA (vitesse maximale aérobie), l’un des objectifs sera notamment d’améliorer votre VO2max, le maximum des capacités de votre principal moteur, le système énergétique « aérobie ». 

Plus ce fractionné sera long, par exemple « 5×3min à ≈ 95% de VMA, récup 2min30 », plus l’objectif d’adaptation visera à améliorer vos capacités cardiovasculaires. C’est-à-dire à la fois la capacité des « ouvriers » de votre usine aérobie à consommer de l’oxygène et également à le transporter.

En clair, améliorer le processus d’acheminement de l’oxygène de votre ventilation, jusqu’au système sanguin, vers les muscles sollicités.

Si vous mettez un cardiofréquencemètre sur ce type de séance, le principal constat sera que vous passerez un temps assez important proche de votre fréquence cardiaque maximale. Cela tombe bien, elle est le reflet de votre travail cardiovasculaire.

A l’inverse, sur des « VMA courtes », type 30/30, il sera plus difficile de retrouver ce temps de travail cardiovasculaire. C’est assez logique, puisque sur chaque récupération, le système redescendra et repartira donc chaque fois de là où il en était en fin de récupération. C’est pourquoi on va courir plus vite, entre 105 et 110% de VMA environ. Une autre solution pourra être de rendre les récupérations plus ou moins actives et donc solliciter plus ou moins le système cardiovasculaire. Finalement, en général, on se rend compte qu’il faut au moins 4’ de temps de travail effectif (l’addition des temps d’effort), pour qu’il y ait un minimum de temps passé proche de VO2max ou FCmax. Par exemple, 2×(10×30/30 à 110% de VMA, récup 3min entre les 2 blocs).

Et, plus vous abaisserez les temps d’effort avec un objectif de travail à VMA (vous pourrez par exemple baisser jusqu’à du 15/15, 15 sec de course à 110-115% de VMA Vs 15 sec de récupération), moins vous travaillerez votre moteur, au profit de votre capacité à recruter de l’oxygène au niveau musculaire, tout en cherchant à produire suffisamment de force pour atteindre la vitesse souhaitée sur une durée relativement courte. Ce sera finalement le type d’exercice d’aérobie max parfait pour les sports collectifs, chez qui le système aérobie a pour principal objectif de renouveler les réserves de phosphocréatine (la source d’énergie permettant de faire des sprints à bloc, par l’intermédiaire d’une autre filière énergétique, l’anaérobie alactique).

 

Même sur des constructions de séances différentes où chaque fois on pourrait s’exclamer « je vais travailler ma VMA ! », je pourrai donc viser des adaptations physiologiques différentes.  

 

Si l’on ajoute les fractionnés plus ou moins longs et plus ou moins rapides et les sorties longues ou courtes à basse intensité, on comprend assez aisément que les adaptations visées seront à chaque fois différentes, mais principalement physiologiques.

Evidemment la dimension mentale pourra également entrer en jeu. Réaliser des séances très intenses ou longues pourra par exemple permettre de décaler son seuil de tolérance ou d’endurance mentale à la difficulté.

La technique également. Courir au-dessus de son allure de course demandera une organisation biomécanique plus complexe qui rendra souvent plus facile, donc moins énergétique le retour aux schémas de son allure de course. De la même façon, un fractionné long ou une sortie longue obligera à être le plus économique possible, au risque d’épuiser son énergie ou de créer trop de dégâts qui pourraient s’avérer irréversibles.  

 

Et alors les sprints ?

 

Le travail à VMA pourrait donc rendre la technique plus économique à plus basse intensité ? Mais alors pourquoi ne pas travailler encore plus vite ??

Une forme d’entraînement en fractionné peu utilisée par les coureurs adeptes des longues distances consiste par exemple à répéter des sprints à vitesse maximale d’une durée de 5 et 10 secondes avec un temps de récupération très court (≤20 secondes).

Un exemple de séance suivant le niveau des sportifs et pour un coureur à pied pourrait être : 2×(10×30m à 60 m à fond, récupération passive 15-20 sec). Cette fois-ci la consigne est de se mettre à bloc, il n’y a plus de pourcentage, d’écoute ou de gestion. Il faut courir, pédaler, nager le plus vite possible !

Ici l’objectif n’est absolument plus cardiovasculaire. Lors de sprints répétés, la durée d’effort global des séries est en effet trop courte pour permettre au système cardiorespiratoire d’avoir suffisamment le temps de se lancer et d’être efficace. Il sera donc très compliqué pour la fréquence cardiaque ou la VO2 d’approcher leur maximum.

Cette fois-ci le principal intérêt sera musculaire. En effet, ce type de séance impose de recruter la majorité, pour ne pas dire toutes les fibres musculaires, avec l’objectif d’atteindre une vitesse de course, de nage ou encore de pédalage qui soit maximale. Les contraintes mécaniques sont également nettement plus élevées que lorsque l’on court à une allure proche de la VMA. Dans ces circonstances, le travail de sprints répétés permet de renforcer les fibres musculaires et d’augmenter leur tonicité, leur capacité de réponse.

 

Améliorer la qualité de l’appui !

 

Cela s’avère intéressant pour deux raisons principales :

1/ Ce type d’entraînement améliore la qualité du geste. On parle ici de la qualité de pied en course à pied, de pédalage en cyclisme ou de nage en natation. Par exemple, en sprintant en course, le pied apprend à restituer l’énergie qu’il reçoit au moment de l’impact au sol. Il agit ainsi davantage comme un ressort rigide, ce qui permet de réduire la quantité d’énergie perdue à chaque pas. En clair, on améliore la transmission de la force fournit par nos muscles (Voir : De la trotinette pour courir plus vite et de la proprioception pour rouler plus longtemps…Une blague ? NON !).

Lorsque ce type de séance est répété régulièrement, on constate une amélioration progressive de l’économie de course, de nage ou de pédalage. Or, et cela est trop souvent oublié, l’un des facteurs de performance les plus importants, s’avère se trouver être cette économie du geste.

En clair, quel est le pourcentage de consommation à une vitesse (puissance pour les cyclistes) donné en fonction du maximum de ton moteur. Donc, si l’on réduit les rapports pour une même vitesse, on pourra aller plus vite pour un rapport identique. Ou, si vous manquiez d’essence dans le moteur pour finir vos courses, alors cela pourrait s’avérer être une solution afin de tenir plus longtemps. Nous vous le répétons régulièrement dans nos articles, à très haut-niveau l’économie du geste, l’efficience, s’avère être le plus souvent le facteur le plus discriminant de la performance sur le terrain. Sans avoir besoin d’améliorer ses qualités énergétiques, nos performances seraient donc potentiellement améliorées par « une consommation aux 100 km » abaissée.

 

sprint2

 

2/ Ce type d’entraînement impose de fortes tensions musculaires. Et cela a des répercussions positives. Lorsque l’on sprinte, les contraintes mécaniques exercées sur les muscles et les tendons sont nettement plus importantes qu’au cours d’une séance de fractionné classique autour de VMA. On le ressent d’ailleurs très facilement lors des premières séances puisque celles-ci s’accompagneront généralement d’un certain niveau de courbatures, le lendemain, voir beaucoup plus loin. En effet, ces petits dommages musculaires vont stimuler le renforcement de nos fibres qui, séance après séance, deviendront de plus en plus robustes et capables de supporter une charge de travail plus importante.

Attention toutefois, ce type de séance ne sera pas simple à passer pour des néophytes. L’objectif sera toujours de viser une implication neuromusculaire qui soit maximale, donc engagez-vous à fond !

Mais, si elles sont trop difficiles à réaliser, notamment si une baisse trop importante du niveau de performance se produit au fil des répétitions, il faudra adapter la séance pour pouvoir conserver cette implication max ! Vous pourrez diminuer la durée de sprint (par exemple autour de 10 secondes pour privilégier la qualité. Ou, si ceux-ci se passent bien, mais que vous n’arrivez pas à suffisamment récupérer pour repartir, jouez sur la récupération en pouvant aller jusqu’à la minute ou ne faire qu’une série, ou encore deux séries de cinq répétitions par exemple.

Vous êtes le chef d’orchestre de votre planification. L’objectif reste de valider vos séances, et qu’elles s’insèrent dans vos planifications. Il faudra donc voir comment vous encaissez cette première séance, pour réajuster au besoin sur les suivantes. Tout en ayant toujours en tête qu’elles devront imposer un certain stress neuromusculaire, soit laisser quelques traces le lendemain, mais pas pendant plusieurs jours et surtout sans vous blesser.

 

Oui au sprint long en fractionné

 

Une seconde forme de travail fractionné associée au travail de sprint consiste à réaliser des sprints plus longs (~30 secondes, un peu plus pour les plus aguerris et spécialistes des plus courtes distance) entrecoupés de récupération de 2 à 4 minutes (1min30 pour les plus aguerris).

Par exemple, en course à pied : 8-10×150-200m à allure maximale, récupération 2-4 minutes, en décidant de la durée de cette dernière pour boucler la séance. Là encore, l’intérêt de ce type de séances n’est pas autant cardiovasculaire qu’un travail à VMA mais à nouveau davantage musculaire. Si les arguments mentionnés pour les sprints répétés restent d’actualité, ce type de séances présentera de surcroît l’avantage de fortement solliciter la consommation et le recrutement de l’oxygène au plan musculaire, ce qui aura un double avantage pour le sportif d’endurance.

Ce format de séance sera souvent plus difficile à réaliser. Enchaîner les efforts de 30 secondes à fond, demandera une réelle capacité d’exécution. Et oui, l’efficacité est encore plus vraie à très haute vitesse qu’en endurance.

S’il vous est compliqué d’approcher les 30 secondes vite, privilégiez d’abord le premier travail où les répétions sont plus courtes. Lorsque vous vous en sentirez capables, n’hésitez pas à fractionner la séance en deux séries. Par exemple 2×(4-5×150m). La récupération entre les deux séries importera peu ( 6 à 8 ‘ ), ici l’objectif prioritaire sera la qualité de réalisation.

Enfin, cette fois-ci la récupération entre les répétions pourra être active, car la longueur des sprints provoquera une utilisation plus importante de la filière anaérobie lactique. C’est une bonne nouvelle, elle amènera une source d’énergie supplémentaire permettant de tenir l’intensité sur les 30 secondes. Une moins bonne, sera qu’elle provoquera une accumulation d’ions H+ au niveau musculaire, ceux qui nous piquent les jambes sur les fameuses séances « lactiques ». Réaliser une récupération active à intensité très très modérée, permettra par le système vasculaire d’évacuer ces derniers.

 

Faire preuve d’imagination

 

Bien évidemment, loin de nous l’idée de vouloir remplacer les séances « énergétiques » qui devront rester la base de vos programmes d’entraînement. Mais, il ne faudra jamais occulter que quel que soit votre activité et sa durée, ce qui vous fera avancer sera votre gestuelle technique. Et, à nouveau, plus celle-ci sera efficace, plus vous pourrez aller vite et loin et transmettant du mieux possible votre force et votre énergie.

Les exercices seront multiples dans cet objectif : travail de renforcement musculaire, de proprioception, de gammes techniques ou encore ici de sprints. N’hésitez pas aller sur notre base d’articles, vous pourrez retrouver différents contenus sur ces sujets.

N’occultez pas que ces sollicitations seront plus ou moins traumatisantes. Il ne faudra donc pas qu’elles s’ajoutent à un programme déjà difficile à réaliser. Si c’est le cas, elles ne devront ni plus ni moins remplacer une séance déjà existante.

Un indicateur fiable de leurs bonnes réalisations sera le niveau de courbatures du lendemain. Attention, elles ne devront durer que 24h, 48h grand maximum. En fonction des premières séances, réajustez en ce sens, et adaptez au fil des semaines.

N’oubliez pas que l’un des facteurs clé de toute planification d’entraînement réside dans la variété des contenus de séances qui la compose. Pour stimuler de nouvelles adaptations et donc du progrès, il sera indispensable de provoquer un certain stress, mais également de renouveler régulièrement les contraintes énergétiques et musculaires qu’imposent les séances d’entraînement. Sauf si vous souhaitez reproduire une planification qui a fonctionné, il ne faudra donc pas hésiter à casser la routine et à trouver de nouveaux leviers de progression. Soyez donc curieux, et osez sortir des sentiers battus en étant curieux et innovants.

 

image1
aubry_anael
image3
@AUBRYANAEL
image5
Anaël Aubry
image6
Anaël Aubry Sport Scientist

 

 

 

1 réaction à cet article

  1. L’article est intéressant mais contradictoire sur la partie sprints courts puisque l’auteur écrit « le travail ne sera pas cardio » tout en préconisant des « récupérations très courtes ». Si le but est de travailler l’efficacité musculaire, le recrutement de fibres rapides et l’économie de course alors il serait plus bénéfique d’allonger les récup afin de courir relaché avec une meilleure technique de courses. La plupart des études parlent de récup d’environ 2 min sur sprints courts.

    Répondre

Réagissez