VMA Ascensionnelle : Définition et évaluations

Le trail, c’est de la course à pied technique en 3D. Aux qualités de coureurs, généralement attestées par des tests de VMA, de fraction de VO2max et de coût énergétique, doivent s’ajouter des qualités de grimpeur et de descendeur. Si la réussite en descente est tributaire de qualités musculaires, techniques et psychologiques, il semble que la montée s’en tienne aux qualités physiologiques du traileur. Alors comment s’évaluer en montée ?

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Un trail se caractérise par sa distance et son dénivelé positif. Même si la descente est plus traumatisante et sélective, il faut être efficace en montée si on veut performer, et cela quel que soit son niveau. Seulement voilà, il y a une multitude de types de montées, avec des pentes et des technicités variables. On peut être efficace sur une pente à 20% et laborieux sur une pente à 40%, bon sur une course de montagne et médiocre sur un kilomètre vertical aux pentes vertigineuses ! Pourquoi ? Parce que le geste et les qualités requises sont différentes.

Pour preuve, nos meilleurs français en course de montagne ne sont pas les meilleurs en kilomètre vertical, car quand la pente s’accentue, la marche succède à la course, l’énergie élastique gratuite de renvoi est réduite à néant, la biomécanique du geste change et la puissance règne alors en maîtresse.

Chacun a pu le constater sur un trail montagneux. On peut être à l’aise sur les pentes courues puis se faire déposer dans les parties abruptes, et vice versa.

 

VMAa, cousine de VMA

Sur des pentes raisonnables (<20%), la VMA ascensionnelle (ou VMAa) est fortement corrélée à la VMA à plat pour la raison précitée. Bien entendu, le pourcentage de pente à partir duquel l’individu se met spontanément à marcher dépend de ses capacités et de son expertise, les 2 étant liées. En effet, on sait que l’athlète se met naturellement à courir à partir de 7 km/h afin de bénéficier de la restitution de l’énergie élastique. Prilutsky et Gregor, 2001, ont mis en évidence un degré d’activation des muscles extenseurs des articulations du genou et de la hanche qui induit la course. Mais courir à 8km/h dans une pente à 20% revient à progresser à 18.5 km/h sur le plat, réservé à l’élite !

En course, même à faible allure, le cycle étirement-raccourcissement de la foulée reste efficace, les élastiques des membres inférieurs (triceps sural et tendon d’Achille) sont mis en tension durant la phase de vol pour restituer un maximum d’énergie gratuite à l’impulsion suivante. Mais plus la pente devient importante, et plus cette énergie gratuite se fait rare, jusqu’à disparaître au-delà de 20%.

Ainsi, sur pente raisonnable, la VMA ascensionnelle reste bien corrélée à la VMA à plat (voir figure 1). Par contre, au-delà de 20% et/ou sur terrain technique, c’est la puissance musculaire qui va être à l’œuvre, laissant la place à d’autres profils de coureurs.

Fig 1 : Corrélation forte entre VMAa et VMA (sur pente moyenne et non technique)
Fig 1 : Corrélation forte entre VMAa et VMA (sur pente moyenne et non technique)

L’usine à gaz de la VMAa

Ces constats de terrain nous orientent donc vers 2 types d’évaluation : en pente moyenne et en pente très forte, c’est à dire une évaluation courue et une évaluation marchée. Alors quelles pentes choisir pour s’évaluer ? C’est là que ça se corse car si les VMA à plat sont comparables sur toute la planète, les VMA ascensionnelles ne sont comparables que sur le même terrain, la même pente et donc la même technicité. Par exemple, pour un athlète de niveau moyen, la VMAa pourra passer du simple au double (de 700 à 1400 m/h) pour des pentes de 5 à 30%. Comparer ses VMAa n’a donc aucun sens !

Nous proposons donc d’évaluer sa première VMA ascensionnelle sur une pente à 20%, et de répéter le test de temps à autre sur cette même pente.

 

  • Sur quelle durée ou distance s’évaluer et comment calculer la pente ?

Le test doit évaluer la puissance du système aérobie en côte. Comme pour le test de VMA, il doit avoir une durée moyenne de 5-6 mn, disons 5, pendant laquelle il faudra accomplir le dénivelé positif le plus important possible. On peut aussi prendre le problème à l’envers et fixer à l’avance le point d’arrivée et le point de départ, avec une différence d’altitude de 100m pour les débutants. On chronomètre et on en déduit la VMA ascensionnelle par un simple calcul. Par exemple, l’athlète qui effectue 100m D+ en 5mn a une vitesse ascensionnelle de 100 x 60/5 = 1200 m/h ; celui qui a besoin de 8mn pour réaliser la même ascension a une VMAa de 100 x 60/8 = 750 m/h.

Comme pour la VMA à plat, cet indice est un bon indicateur de la capacité à performer en côte mais il ne conditionne pas la réussite en trail sur des ascensions longues et répétées. L’entraînement aura pour but de permettre à l’athlète de tenir un pourcentage élevé de cette VMAa sur une distance ou une durée donnée.

 

  • Comment calculer la pente ?

Pas si simple car la définition de la physique n’est pas la plus intuitive. Il est faux de faire le rapport entre la longueur de la pente et le dénivelé positif, même si ce calcul est fréquemment utilisé. Tout d’abord, une pente s’exprime en pourcentage ou en degré. Pour les degrés, ce n’est pas très compliqué si on a assimilé les cours de trigonométrie de 4ème et 3ème. 

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La géométrie nous dit que sinus α = dénivelé positif/longueur de la pente, et donc α en degrés = inv sinus (D+/pente)

Les cardiofréquencemètres avec GPS nous donnent toutes les indications utiles pour calculer cette pente. En imaginant qu’il faille couvrir 800m pour réaliser 150m D+, l’angle de la pente est de inv sin (150/800) = 10.8°. Bien entendu, il faut considérer que la pente est régulière, ce qui n’est jamais le cas.

Pour les pourcentages, il faut calculer le rapport entre le dénivelé positif et la distance horizontale (et non la longueur de la pente !).

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La pente, c’est le rapport de la distance verticale à la distance horizontale

 

Ainsi, quand on grimpe de 100m D+ pour une distance de 1km, on ne parcourt pas une pente à 10% (100/1000 x100) car c’est la distance horizontale qui nous intéresse. Par Pythagore, on sait que la distance horizontale est la racine carrée de la différence des carrés de la pente et du dénivelé positif, soit 995m. Le % de pente devient (100/995) x 100 = 10.05%. Tout ça pour ça, me direz-vous ? et vous avez raison car sur des pentes faibles à moyenne, la différence n’est pas significative. Mais prenons l’exemple du kilomètre vertical de Fully en Suisse, le plus rapide du monde à ce jour, 1.9 km pour 1000m D+. Cette fois, notre calcul nous donne 61.9 % avec la bonne méthode pour 52.6 % avec la méthode erronée. A présent, la différence est énorme !

Ensuite, nous avons besoin d’une deuxième mesure de la VMA ascensionnelle : celle en pente très raide (type KV de Fully) où la marche est quasi-permanente. Puisque l’élasticité tendino-musculaire est réduite à néant, c’est la puissance qui est prépondérante. Cette qualité est également essentielle sur les trails techniques et montagneux et justifie son évaluation comme son développement. Là encore, il faut choisir son terrain de référence une bonne fois pour toutes, par exemple 100m D+ sur une distance courte d’environ 400m, ce qui donne une pente de 25.8%. Sur cette pente, la vitesse de progression en km/h sera très faible mais il y a de fortes chances que la vitesse ascensionnelle (en m/h) soit plus élevée que dans la pente à 10%.

Fort de ces 2 indices, vous allez pouvoir estimer votre temps d’effort sur une ascension en tenant compte du dénivelé total, de la pente, de la technicité et de vos qualités d’endurance et de puissance. Sur 1000m D+ en continu, un athlète peut évoluer entre 80 et 90% de sa VMAa sur ce même type de terrain. Donc une VMAa de 1200 m/h peut permettre de gravir la montagne dans un temps compris entre 55mn et 1h02.

Bien entendu, en complément de la VMAa, il est recommandé de s’évaluer sur une longue pente qui servira de séance étalon.

La prochaine fois, nous verrons comment s’entraîner pour développer ces VMA ascensionnelles.

4 réactions à cet article

  1. Bonjour,
    Est-ce que le GPS des suntoo mesure bien la distance sur la pente et non la distance horizontal ?
    Un grand merci pour vos articles.
    Jean Heckly

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    • Bonjour Jean. Oui le GPS des Suunto mesure la distance sur la pente.

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  2. Bonjour, est-ce qu’une montée d’escaliers en continu (tour de 59 étages/230 m du RDC au sommet) est un test probant pour la VMAa ? Ou bien est-ce trop différent d’un effort sur terrain naturel où on ne trouvera jamais la régularité de marches en béton rigoureusement identiques (en plus on peut s’aider de la rampe) ?
    Merci.
    Franck

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  3. Bonjour Franck, oui tout à fait mais rappelons que le temps d’effort doit être compris entre 4 et 7min pour correspondre à de la puissance aérobie.
    Sinon, les escaliers imposent un travail de force un peu différent de celui d’une pente régulière (les appuis sont différents), mais tout aussi utile, voire plus dans le gain de force et de puissance

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