La nage en groupe au départ d'un triathlon ne s'improvise pas. Contrairement aux entraînements en piscine, où l'on nage seul, il faut ici se frayer un chemin dans la masse et utiliser au mieux l'aspiration ou "drafting", comme le détaille Anaël Aubry, chercheur et expert lepape-info.

Quel que soit la distance, le lieu, le promoteur, la natation en triathlon se dispute toujours en groupe avec un départ commun et le droit de s’aider, à l’inverse de certains formats l’interdisant par exemple à vélo. Il existe bien quelques triathlons contre la montre ou en piscine avec un nageur par ligne d’eau, mais ceux-ci ne sont pas légion. Il y a donc un réel intérêt à savoir nager en groupe. Comme vous prendriez le temps de travailler votre position contre la montre à vélo ou le dénivelé prévu en course à pieds, pourquoi ne pas le faire en natation ? Dans cet article nous allons effectuer une revue de la littérature scientifique ayant porté sur le drafting (être abrité par le concurrent nous précédant) en natation. Et oui, comme en vélo il y a un réel intérêt à savoir se cacher lorsque cela est autorisé.

Pourquoi se cacher ?

Nager en crawl directement derrière ou sur le côté d’un autre nageur est couramment utilisé lors des compétitions en triathlon et dans les épreuves de natation en eau libre. Cette stratégie permet de limiter le coût énergétique de la nage et de la sorte d’augmenter le niveau de performance, grâce à une réduction de la traînée hydrodynamique (lorsqu’un objet avance dans un fluide il subit une distribution de pressions). Les bénéfices associés à la nage en position abritée ont été étudiés principalement par trois équipes de recherche au cours des deux précédentes décennies. La principale hypothèse explicative de la réduction de la traînée hydrodynamique associée au drafting serait que la dépression créée devant le nageur diminuerait le gradient de pression entre les zones à l’avant et à l’arrière de celui-ci et faciliterait son déplacement.

Quels bénéfices ?

Dans des conditions sous-maximales, plus précisément lors d’un test réalisé à 95% de la vitesse moyenne maximale pouvant être maintenue sur une distance de 549m, l’équipe de Bassett a montré que le drafting affecte la réponse métabolique en natation. La valeur de consommation d’oxygène est réduite de 8 %, la lactatémie de 33 % et la difficulté d’effort perçue de 21 %, par rapport à une course-contrôle nagée seul et à la même vitesse. Ces réductions sont associées à une baisse des résistances à l’avancement de 13 à 26% par rapport au nageur-leader pour le nageur en position abritée, en fonction de la vitesse de déplacement de ceux-ci. Ces auteurs ont montré que nager dans une position abritée résulte en l’augmentation de la vitesse de nage (3,2% soit 20m su une épreuve de 400m) et de l’amplitude de nage concomitante à une réduction de la lactatémie et de la fréquence de nage. Ils ont observé que le gain de performance est corrélé à l’habilité et à la masse grasse du nageur ; les meilleurs nageurs présentant un faible pourcentage de masse grasse étant les plus avantagés.

Les équipes du professeur Chollet ont confirmé ces résultats en montrant que la vitesse de nage augmente de 1,34m.s-1 à 1,39m.s-1 lorsqu’un nageur s’abrite derrière un autre nageur lors d’une épreuve maximale sur 400m mais les ont surtout prolongés en distinguant que le drafting contribue à la stabilisation des paramètres cinématiques de la nage en crawl (c’est à dire l’amplitude et la fréquence de nage). La distance séparant le nageur leader du nageur abrité influence toutefois significativement l’amplitude des gains associés au drafting en natation, de sorte que plus cette distance est réduite, plus les gains sont grands.

Deux études des équipes de Chatard ont montré que les bénéfices du drafting sont maximisés lorsque cette distance est comprise entre 0 et 50cm. Pour autant, des gains significatifs apparaissent toujours jusqu’à 150cm. Ce résultat expliquerait la distance moyenne de 60cm spontanément adoptée par les triathlètes en situation de compétition (Millet et al. 2000). Etant donné que la flottabilité semble influencer les bénéfices du drafting comme le révèlent les bénéfices accrus pour les nageurs présentant un faible pourcentage de masse grasse (Basset), un autre paramètre à prendre en considération est le port de la combinaison souvent utilisée en triathlon. Delextrat et ses collaborateurs ont à cet égard démontré que l’effet positif du drafting est conservé, y compris lorsque les triathlètes portent une combinaison. Ces auteurs ont distingué une baisse significative de la fréquence cardiaque (-7%) chez des nageurs en position abritée portant une combinaison lors d’une épreuve maximale sur 750m par rapport à une situation contrôle nagée à une allure identique.

A travers ces résultats, il apparaît donc que lors d’une épreuve de triathlon, le drafting en natation est susceptible d’incarner un bénéfice supplémentaire au port de la combinaison en contribuant à une réduction accrue du coût énergétique de la nage.

En pratique…

Beaucoup de triathlètes s’entraînent seuls pour réguler leurs chronos, effectuer leurs séances personnelles ou tout simplement pour cause d’emploi du temps chargé. Soit, tout cela est louable. Seulement, il ressort souvent aux arrivées de triathlons des critiques personnelles sur la gestion de sa propre natation : « j’ai mal géré le courant », « je me suis égaré » « je me suis fait nager dessus » « je prenais trop de coups donc me suis écarté du peloton », etc… Or après cette revue de littérature il semble essentiel de se familiariser (lien article familiarisation) avec ce contexte si particulier. Dans la mesure du possible essayez sur certaines séances en piscine de nager avec un ou plusieurs partenaires de niveaux proches pour « réapprendre » à suivre les pieds et à les garder. Sur certaines séances oubliez les chronos et mettez en place des séances « eau libre » en donnant des consignes à certains partenaires de « jouer des coudes » pour s’entraîner à être capable de garder le sillon du lièvre malgré le milieu hostile. Vous pouvez même mettre des obstacles aléatoires avec un partenaire à l’arrêt dans la piscine mais se déplaçant aléatoirement avec la consigne de ne pas perdre la trace du partenaire vous précédant. Enfin, la belle saison arrivant retournez en milieu naturel ! Car il va falloir garder les bons pieds avec une combinaison changeant vos repères techniques, une lumière fluctuante, une eau plus ou moins claire, un courant plus ou moins fort, de possibles vagues, des parcours non rectilignes, etc…bref un milieu à apprivoiser. L’objectif étant que le jour J vous puissiez répondre à différents schémas de course sans être surpris, pour pouvoir vous y adapter sans soucis, vous cacher derrière un allié de circonstance et conserver un maximum de cartouches avant la suite de votre compétition.

Pour suivre l’actualité d’Anaël AUBRY sur Twitter : @AUBRYANAEL et Facebook : http://facebook.com/Anael.AUBRY.Sport.scientist

 

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2 réactions à cet article

  1. Merci beaucoup pour ce précieux billet!
    Je recherche des lieux (lacs) en Ile de France où s’entraîner justement. Je pensais au Lac d’Enghein les Bains mais je ne sais pas si ça se fait? Et si oui, où exactement?
    Merci de vos conseils
    Sandrine

    Répondre
  2. Les bases de loisirs de Jablines, de Torcy ou de Cergy.

    Répondre

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