Un indice d’endurance en trail, possible ?

Malgré 40 ans d’existence, l’indice d’endurance (IE) est un paramètre de la performance aérobie rarement calculé chez les athlètes.
Son établissement peut nous apporter de précieux enseignements quant aux qualités des athlètes sur route.
En trail, c’est une autre paire de manches car la vitesse n’est plus proportionnelle au temps. Alors, comment faire ?

Même si dans l’acception populaire, l’endurance est la capacité à durer et à résister à la fatigue, c’est autre chose d’un point de vue physiologique.

En effet, il ne faut pas confondre capacité aérobie et endurance.

Cette dernière se définit comme la fraction de VMA/VO2max qui peut être maintenue sur une distance ou une durée donnée.

L’individu le plus endurant est celui dont la vitesse décroit le moins avec le temps. Ainsi, on peut être moins rapide qu’un autre individu (c’est-à-dire avoir une Vitesse Maximale Aérobie plus faible) mais être plus endurant.

Défini par Péronnet et Thibault en 1984, l’indice d’endurance (IE) définit la pente de décroissance de la vitesse en fonction du temps. Plus cet indice (négatif) est proche de zéro et plus l’athlète est endurant. Parmi des coureurs de mêmes VO2max et coût énergétique, l’indice d’endurance est un facteur discriminant de la performance.

L’indice en question est le suivant :

IE = (100-%VMA) / ln(7/t)
avec %VMA = (vitesse de course/VMA) x 100
t = le temps de course en min

7 = temps maximal estimé de maintien de la VMA, en min

Cette formule nécessite quelques explications.

Tout d’abord les auteurs ont constaté que plus la durée d’effort s’allonge pour un même individu, et plus la vitesse moyenne décroît. Cette vitesse décroît rapidement de 7 à 30 minutes d’effort, puis de manière plus linéaire. Ainsi, la vitesse par rapport au temps est une fonction dite curvilinéaire.

Le problème est qu’il est impossible de comparer 2 ou plusieurs courbes de ce type entre elles. Péronnet et Thibault ont eu l’idée de transformer la fonction curvilinéaire en fonction linéaire en introduisant la fonction logarithmique (logarithme Népérien). Ainsi, il devient aisé de comparer les courbes.

L’indice d’endurance est tout simplement le coefficient directeur de la pente. Comme la vitesse décroît, la pente est descendante et son coefficient directeur est négatif. Plus le coefficient directeur sera proche de zéro et plus l’athlète est endurant, sans oublier bien sûr qu’il faut tenir compte de la valeur de la VMA initiale.

L’IE en exemple

Prenons l’exemple de 2 athlètes avec une VMA de 15 km/h. Le premier a réalisé 3h30 sur marathon et le deuxième 3h45. Calculons leurs IE respectifs :

 VMA en km/hTemps sur marathonVitesse sur marathon% de vitesse maintenuIE
Athlète 1153h30 = 210 min12 km/h80%-5,88
Athlète 2153h45 = 225 min11.25 km/h75%-7,2

Globalement, un IE proche de 5 témoigne d’une très bonne qualité d’endurance. Plus l’IE se rapproche de 10 et plus cette qualité est médiocre.

Prenons à présent le cas concret d’un athlète avec 18.5 de VMA et qui réalise 3h sur marathon. Sa vitesse moyenne est de 14.65 km/h et le pourcentage de vitesse maintenu est de 79.2%. Son IE est de -6.4. Certes, son IE est plus faible que celui de l’athlète 1 mais son niveau de performance est supérieur.

Cela peut permettre à chacun et aux entraîneurs d’orienter les entraînements. Bien entendu, on peut calculer les indices d’endurance à partir de différentes distances et donc durées.

Et en trail ?

Dès que l’on passe de la route aux chemins, ça se corse car il est impossible de calculer un indice à base de pourcentages de vitesses. De plus, la fraction de V02max est impactée par de nombreux autres paramètres en raison de la durée de l’effort, de la nature du terrain et des conditions météo entre autres.

Ainsi, le seul moyen d’évaluer une intensité aérobie est de se fier aux fréquences cardiaques, et plus particulièrement au pourcentage de fréquence cardiaque de réserve tenu sur la durée.

En effet, le pourcentage de FC réserve est en lien avec le pourcentage d’intensité aérobie. Ainsi, plus ce pourcentage est élevé pour une même durée d’effort et plus le niveau d’endurance est élevé.

Toutefois, on ne peut pas parler d’indice d’endurance au sens de Péronnet et Thibault car on ne fait pas référence à une intensité maximale.

Toutefois, il est utile pour un même athlète de comparer les pourcentages tenus sur différentes durées afin d’évaluer ses points forts/points faibles et d’éventuels leviers de progression, notamment en termes de pacing.

Sur l’exemple ci-dessous, une athlète de trail de niveau international avait tenu une moyenne de 85% de FC réserve sur 6h30 d’effort, ce qui est exceptionnel. Cette athlète ayant une faible puissance aérobie, son niveau d’endurance expliquait en grande partie ses résultats au niveau mondial.

% de FC réserve ~ % d’intensité aérobie. Ici intensité moyenne > 85% FC Réserve sur 6h30 : exceptionnel !

Sur la route, la notion de pacing (gestion de l’intensité de l’effort) intervient directement sur l’IE. En trail, c’est la même chose. Moins il y a de variations dans les fréquences cardiaques, plus l’intensité moyenne est élevée, et plus l’endurance est importante.

Toutefois, il existe une limite à cette méthode, d’ordre physiologique. Au-delà de 6-7h d’effort, les FC ne reflètent plus vraiment l’intensité de l’effort. En effet, les phénomènes inflammatoires provoquent une hypervolémie dont la conséquence est la baisse des FC. En quelque sorte, le cœur se met en protection.

En conclusion, que l’on soit coureur de route ou de trail, il est intéressant d’évaluer son niveau d’endurance et de faire évoluer positivement ce paramètre à l’entraînement pour être plus performant en compétition.

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