Le surentraînement, ça se soigne docteur ?

La question : Bonjour, comme beaucoup de fans de course à pied j’imagine… Je veux toujours avaler plus de kilomètres que la sortie précédente, toujours faire mieux, mais je sais que mon corps a ses limites ! (fracture de fatigue au calcanéum l’an passé). J’ai du mal à me freiner dans mon élan si j’ai la pêche, malgré tout ce que je sais sur le surentraînement ! Ça se soigne docteur ?

La réponse de Yannick Guillodo, médecin du sport

Vous avez raison, plusieurs sportifs, comme vous, présentent ce désir de vouloir toujours faire plus. Pour certains médecins, il s’agit d’une véritable addiction aux sports et, dans le cas présent, à la course à pied. Ces sportifs prennent le risque, comme vous le soulignez fort justement, de créer des pathologies en rapport avec le dysentraînement ou le surentraînement. La plus classique et la plus sérieuse de ces pathologies de surentraînement est la fracture de fatigue ; l’os finit par casser face aux contraintes multiples et répétées.

Vous avez connu cela et, malgré tout, vous n’êtes pas « guéri ».

En fait, la problématique tourne autour de l’objectif. Avez-vous vraiment défini votre objectif sportif et votre désir de qualité de vie ?

Si votre objectif sportif est centré sur le court terme (moins de 10 ans de carrière sportive, intensive), il est tout à fait tolérable, même pour un médecin, « d’aller chercher » le maximum de ce que le corps peut endurer. Dans ce cas, votre objectif est précis, vous avez fixé quelques courses pour lesquelles vous avez déterminé une performance élevée. Le « plan de carrière » est établi pour quelques années. Mais ces quelques années intensives passées, il faudra revenir à une activité sportive beaucoup plus ludique, moins intensive, moins agressive pour la santé.

Si votre objectif est centré sur le moyen terme (10 à moins de 20 ans de carrière sportive), il faudra obligatoirement introduire des plages de repos plus conséquentes et fixer un seul  « sous objectif annuel » (par exemple, un marathon et un seul, un ultra trail et un seul). Le but est de maintenir vos performances, environ au même niveau, sur ces 10 ou 15 ans. On voit donc que l’alternance entraînements plus ou moins intensifs et entraînements très ludiques doit être la règle pour maintenir le corps éloigné des pathologies de contrainte ou de surentraînement.

Si votre objectif est centré sur le long terme (courir un marathon à 60 ans ou plus), il faut y penser dès que l’on a 30 ans. En effet, il ne faut pas avoir usé son cœur ou ses articulations, entre 30 et 50 ans, pour tenir cet objectif sportif, très grisant, de courir un marathon à l’approche de ses 70 ans. Donc, on fait du sport pendant de nombreuses années, de façon ludique mais sportive, ce qui n’empêche pas quelques beaux challenges en rapport avec cette idée d’une vie sportive longue.

Vous voyez donc qu’il faut préciser votre objectif : être un sportif usé par l’arthrose du genou à 55 ans, est-ce un objectif ?

Le sport, pratiqué  intensivement pendant de très nombreuses années, ne vaccine pas contre les maladies, retenez cela. Plus vous pratiquez, longtemps, à votre niveau le plus élevé, plus vous prenez le risque d’user prématurément vos articulations et votre cœur.

Il faut fixer nos objectifs de vie sportive : tout est là.

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