Meeting Stanislas (Nancy, 14 juin 2016) : Après la pluie, le beau temps ?

À quelques jours des championnats de France et à deux mois des Jeux Olympiques, le meeting nancéen a offert une belle répétition aux athlètes français et internationaux. Si les performances ont quelque peu pâti des températures, relativement fraîches pour la saison, cette 27ème édition a encore une fois été très réussie. De quoi espérer un feu d’artifice à Rio ?

Même si une partie d’entre eux n’a pas pu exprimer tout son potentiel sur la piste du stade Raymond Petit, la faute à des conditions météorologiques pas franchement estivales (13°C et quelques gouttes de pluie), tous les athlètes français présents au Meeting Stanislas de Nancy ont mis du cœur à l’ouvrage pour tenter de réchauffer le public venu en nombre.

En effet, même si la fraîcheur présente mardi 14 juin 2016 contrastait considérablement avec les températures attendues à Rio en août prochain, l’occasion de s’offrir une répétition à domicile avant de s’envoler pour le Brésil était trop belle pour les membres de l’équipe de France. C’est pourquoi ils étaient nombreux à avoir répondu à l’appel de Pascal Thiebaut, toujours aussi habile lorsqu’il s’agit de concocter un plateau relevé.

Alors que certains avaient décliné l’invitation pour se replonger dans une phase de préparation (à l’instar de Mahiedine Mekhissi, reparti en stage à Font-Romeu), quelques références de l’athlétisme français se sont retrouvées à Nancy pour se confronter au gratin mondial. Si certains avaient déjà composté leur billet pour Rio (Christophe Lemaître, Floria Guei, Yohann Diniz, Dimitri Bascou, Mathilde Andraud, Valentin Lavillenie) et cherchaient à peaufiner leur préparation, d’autres étaient encore en quête des minimas olympiques. L’histoire retiendra que les basses températures ont rapidement annihilé tout espoir de grande performance. Tour à tour, Cindy Billaud (100m haies), Marie Gayot (400m), Wilhem Belocian (110m haies), Stella Akakpo (100m), Florian Carvalho (1500m) et Mickaël Zeze (200m) se sont attaqués au niveau de performance requis, sans malheureusement y parvenir. Pourtant, il en fallait bien plus pour altérer leur sourire ainsi que leur joie de courir, sauter et lancer « à la maison ». Malgré la déception chez certains qui espéraient être tirés vers le haut par l’âpre concurrence internationale, tous se sont prêtés avec enthousiasme au jeu des autographes et des selfies, pour le plus grand bonheur de leurs fans.

Au niveau des performances, les coups d’éclat de la soirée sont à mettre à l’actif de Yohann Diniz, qui a survolé l’épreuve du 5000 m marche en avalant les 12 tours et demi de piste à plus de 16km/h, de Floria Guei qui s’est adjugée le 400m d’une main de maître en 51s37 ou bien sûr du « TGV d’Aix les bains », plus connu sous le nom de Christophe Lemaître, qui a coupé la ligne en 20s34 sur 200m.
Toutefois, il ne faudrait pas occulter les performances de choix de l’algérien Taoufik Makhloufi, vainqueur du 800 dans le temps canon de 1’44’’40 et du chinois Changrui Xue, tout proche d’établir un nouveau record national du saut à la perche en demandant une barre à 5m85 et hauteur d’une prestation convaincante avec 5m75.
Enfin, le frenchie Dimitri Bascou, médaillé de bronze mondial cet hiver sur 60m haies à Portland, n’était pas en reste : en remportant le 110m haies en 13’35, il a réalisé pour la quatrième fois de la saison le niveau de performance requis pour participer aux JO, une régularité très impressionnante dans une épreuve à obstacles.

À l’issue de la compétition, plusieurs athlètes de l’équipe de France ont répondu à nos questions avec beaucoup de sympathie. En voici un aperçu :

Lepape-info : Dans quel état d’esprit vous trouvez-vous à l’approche des JO ? La motivation est-elle différente lors d’une année olympique ?

Christophe Lemaître : « En tant qu’athlète, on mise tout sur les JO, on essaie de gérer la saison au mieux pour être en forme le Jour-J. La préparation est axée exclusivement sur cet événement. Les JO, ce ne sont ni des championnats d’Europe, ni des mondiaux, c’est encore plus fort, c’est LA compétition que l’on veut réussir ! »

Floria Guei : « Cette année, ma motivation est à son summum, d’autant que cela fait 4 ans que je prépare cet événement. Pour le moment tout se passe comme nous le souhaitions avec mon entraîneur, ce qui est très bien, mais il faut aussi savoir rester concentré pour toutes les échéances qui sont en réalité des étapes dans la route vers Rio. »

Valentin Lavillenie : « Non ! (rires) La motivation est toujours la même. Après, il faut savoir que c’est ma première année avec mon nouvel entraîneur et que je n’ai donc pas vraiment de repères par rapport aux années passées. Cependant, mentalement j’ai franchi un cap, j’aborde les compétitions avec un meilleur état d’esprit, mais de là à dire que cela change quelque chose pour une année olympique… Quoi qu’il arrive, il faut se ‘’bouger les fesses’’ (rires). Bien sûr que les JO ça fait rêver, mais les championnats du monde aussi ! Je suis donc dans le même état d’esprit pour toutes ces grandes compétitions qui me font rêver. »

Florian Carvalho : « Bien sûr j’étais venu avec de l’ambition ici à Nancy, je voulais réaliser les minimas pour les Jeux Olympiques mais malheureusement je passe à côté (Florian a couru le 1500m cette saison en 3’35’’39 alors que les minimas sont fixés à 3’35’’00, ndlr). Là tout de suite c’est donc un peu dur mentalement, c’est un peu comme si j’avais fait une croix sur les jeux ce soir… Les occasions de pouvoir réaliser les minimas sont rares, nous ne sommes pas des sprinters : aux championnats de France et aux championnats d’Europe, ce sera des courses tactiques où on risque de tout perdre si on tente de courir sur des bases de 3’35. Enfin, l’essentiel pour moi était de ne rien regretter si les minimas n’étaient pas au bout et c’est chose faite car j’ai pris des risques. »

Cindy Billaud : « La motivation est en effet un peu différente une année olympique. On souhaite réaliser les minimas le plus vite possible mais malheureusement l’issue est différente chez chaque athlète… Dans mon cas ils ne sont toujours pas faits ce qui est un peu stressant. Il n’y a finalement que cela qui change car psychologiquement on a envie. »

Lepape-info : Comment allez-vous maintenant appréhender ces deux derniers mois de préparation avant l’échéance tant attendue ? Allez-vous désormais privilégier l’entraînement à la compétition ?

Floria Guei : « Je vais partir à l’entraînement avant les championnats de France qui arrivent bientôt (du 24 au 26 juin à Angers, ndlr). Ceux-ci vont me servir d’exercice pour les championnats à venir où je courrai sans pression, juste dans l’optique d’ajuster mes courses. Mais avant cela, je repars à l’entraînement dès demain ! »

Valentin Lavillenie : « À partir de maintenant, j’arrête les compétitions jusqu’aux championnats de France. Je vais me préparer tranquillement pour cette échéance. Je vais prendre 2 petits jours de soins avant de réattaquer, histoire d’être sûr qu’il n’y a pas de petits bobos, puis je vais ensuite bien charger pendant une semaine afin de combler des petits manques. Puis je vais de nouveau me reposer quelques jours avant les France et j’irai ensuite là-bas le couteau entre les dents avec l’envie de tout tuer, mais avec le même état d’esprit que les autres compétitions. »

Florian Carvalho : « Il n’y aura peut-être pas de JO pour moi, mais il restera les championnats d’Europe à assurer et puis j’irai à Amsterdam avec de l’ambition, il y aura peut-être de belles choses à réaliser là-bas ! Pour les JO ? Je relativise aussi, car j’ai la chance de pouvoir faire du sport alors que certains ne peuvent même pas courir… Il y a plus grave dans la vie donc je ne m’attriste pas sur mon sort et je vais aller de l’avant. Cela va passer par un nouveau cycle d’entraînement car j’ai enchaîné des courses ces derniers temps et au bout d’un moment, on surfe sur un même état de forme, donc il faut repartir au travail. »

Cindy Billaud : « Là je vais repartir à l’entraînement avec les championnats de France dans le viseur où il faudra que je réalise les minimas à la fois pour les championnats d’Europe et si possible pour les JO. »

Lepape-info : À propos du meeting Stanislas : est-ce important de pouvoir participer à des compétitions de haut niveau devant son public en France ?

Christophe Lemaître : « Oui bien sûr ! Cela permet d’être en contact avec le public français qui nous apporte son soutien tout au long de la saison. C’est l’occasion de signer quelques autographes, de faire des photos et je tiens beaucoup à cela pour les remercier. Je vais donc profiter de cette soirée à Nancy pour bien prendre mon temps avec eux, car ça me fait plaisir et si en plus le public est ravi, alors c’est encore mieux ! »

Floria Guei : « C’est un grand plaisir surtout que l’on se sent réellement soutenu(e) par ce public. Les gens nous interpellent pour des photos ou même simplement pour nous féliciter, c’est vraiment une force en plus ! »

Valentin Lavillenie : « C’est cool d’être en France ! Je me sens comme chez moi dans toute la France ! C’est bien de pouvoir sauter à la maison, il y a plein de jeunes qui viennent, on sent un engouement supérieur à ce que l’on perçoit à l’étranger, c’est logique. Pour ma part, c’est ce que je ressens après la compétition qui change, car pendant il ne faut pas que cela change, il faut rester concentré. Mais après le concours, on récupère plus vite, on a le sourire. »

Florian Carvalho : « C’est toujours un plaisir de courir en France ! On se prépare toute l’année car on aime représenter son pays, alors transmettre des émotions à tous les jeunes que l’on voit autour de la piste, à tous les bénévoles qui ‘’se tuent’’ pour offrir des beaux meetings, c’est un grand bonheur. »

Cindy Billaud : « Cela fait maintenant plusieurs années que je viens ici à Nancy car le meeting est bien placé dans le calendrier et il y a souvent de bonnes conditions… Bon, excepté aujourd’hui (sourire). C’est en tout cas très agréable de retrouver des personnes qui vous suivent sur les réseaux sociaux et qui viennent vous encourager. »

Lepape-info : Vous étiez parti(e) en Afrique du Sud en janvier dernier avec toute l’équipe de France pour un stage préparatoire d’un mois. Est-ce important de partager un tel stage avec d’autres athlètes pratiquant d’autres disciplines ?

Christophe Lemaître : « C’est effectivement important pour la cohésion de l’équipe de France mais pas seulement : faire des entraînement avec des athlètes de haut niveau, quelle que soit leur discipline, cela tire chacun d’entre nous vers le haut, cela nous permet de réaliser des séances de qualité et rend possible la progression de toute l’équipe. De plus, les conditions et les infrastructures sont optimales, il y a donc tout ce qu’il faut pour bien travailler. »

Floria Guei : « Cela aide beaucoup de se préparer à plusieurs car souvent on est habitué à s’entraîner seul, avec ses propres objectifs alors que là on se soutient les uns les autres. C’est donc déjà plus agréable, mais cela devient aussi plus facile de se surpasser à plusieurs ».

Florian Carvalho : « C’est une chance de pouvoir faire ce stage, ne serait-ce que pour les conditions : on en a encore la preuve ce soir, faire des chronos quand il fait froid, c’est difficile. Là-bas, il faisait 30°C tous les jours, il n’y avait pas de vent, cela m’a permis de passer des bonnes séances et d’être serein pour la suite de la saison. Quand on en revient, on a l’impression qu’il fait -10 ! (sourire) De plus, on avait une bonne équipe, avec la possibilité de faire de bons entraînements tous ensemble. On pouvait voir l’état de forme de chacun, c’était réconfortant parfois, mais cela pouvait aussi être une source de motivation pour se donner encore davantage. »

Cindy Billaud : « Aujourd’hui, l’équipe de France c’est une véritable famille ! Lorsque l’on se retrouve, on voit toutes les disciplines, cela change, cela permet de revoir des visages qu’on aime bien, cela nous change de notre quotidien. Voir les séances de certains, cela nous fait prendre conscience qu’on est pas seul(e) à s’arracher à l’entraînement et donc c’est très motivant. Le stage reste difficile car on s’entraîne deux fois par jour, mais comme tout le monde s’encourage, s’entraide, cela passe ainsi beaucoup mieux. »

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