La mort subite du sportif : mythes et réalités

La mort subite du sportif existe et fait peur. Il faut la craindre si on pratique un sport de façon intense et sans surveillance préalable. Heureusement un bilan simple à réaliser permet dans la très grande majorité des cas d’autoriser le sport, car les restrictions sont peu fréquentes, et les interdictions encore plus rares.
Le Dr Bussière, cardiologue du sport, ancien spécialiste des hôpitaux des Armées au Val de Grâce, et vice président du Groupe Réadaptation, exercice et Sport de la Société Française de cardiologie fait le point.

Secouriste

La mort du footballeur Vivien Foe devant des millions de téléspectateurs au cours d’un match de football à Lyon en 2003 avait fortement ébranlé les esprits. Dès 2006, les pouvoirs publics et les médecins ont réagi en permettant l’usage du défibrillateur par tous et en organisant avec les pompiers et la Croix Rouge des  formations simplissimes en 3 gestes devant un arrêt cardiaque : appeler le 15 (c’est à dire le SAMU), masser, défibriller. Cela a permis de sauver 8% de personnes victimes d’arrêt cardiaque en 2014 contre 2% 10 ans plus tôt. Il en reste 92% sur le carreau !

Il n’y a malheureusement pas de statistiques précises sur la mort subite du sportif. En revanche, il a été établi que le sport le plus à risque aux USA est le Basket (on passe d’un risque de 1/40000 dans une population générale à 1/ 10000 chez les Basketteurs et 1/1100 si c’est un basketteur de NBA), vient ensuite le football américain. En Europe, les sports les plus à risque sont le football, le basket, la natation et le rugby. Mais on peut aussi citer le squash et le golf. De plus, le dopage multiplie les risques dans tous les sports. Enfin, n’oublions pas d’évoquer les arbitres de football (pas tous jeunes) qui sont fortement exposés à la mort subite.

On sait qu’aujourd’hui, il y a en moyenne entre 800 et 1000 morts subites par arrêt cardiaque brutal au cours ou juste au décours d’un effort physique intense avant l’âge de 35 ans en France. Il s’agit presque toujours d’une malformation cardiaque, avec dans un tiers des cas un cœur trop épais (cardiomyopathie hypertrophique qui est une maladie familiale), aisément détectable par une simple échographie cardiaque. Plus rarement, il peut s ‘agir de malformation d’une des 3 artères coronaires qui alimentent le muscle cardiaque, et c’est une douleur dans la poitrine ou un malaise inhabituel qui attire l’attention chez un enfant. L’échographie parfois, le scanner des coronaires toujours, vont montrer la ou les anomalies. Plus rarement, il existe des anomalies électriques qui déclenchent des palpitations cardiaques sévères aboutissant à une fibrillation ventriculaire et la pompe cardiaque devenant inefficace conduisant au décès. L’électrocardiogramme (ECG) simple permet de les dépister presque tous, l’échographie, l’imagerie par résonance magnétique nucléaire (IRM) et le Holter (ECG pendant 24 heures) sont des aides complémentaires utiles dans les cas difficiles.

Il faut se méfier enfin de la consommation de produits énergisants, surtout en pilules, contenant des hormones stéroides pour faire gonfler les muscles. Le dopage, ça existe et là, il suffit de recevoir aux soins intensifs une sportive de 30 ans avec un infarctus du myocarde massif qui va compromettre sa vie à cause d’un rail de cocaïne pris avec des amis après un match, pour vous vacciner à tout jamais de toute espèce de drogue.

Quelques règles simples de préventions et un bilan médical

Après 35 ans, changement de paysage, les causes les plus fréquentes sont les plaques d’athéromes et de cholestérol qui boursoufflent la paroi des vaisseaux et qui « claquent », se fissurent ou s’ulcèrent lors d’un effort intense où on fait monter sa fréquence cardiaque au maximum. La pression artérielle grimpe comme si vous régliez votre coeur comme un Karcher qui pulse le sang au maximum brutalement. Mais le vrai problème n’est pas le sport mais l’état de vos artères qui vieillissent plus vite si on fume, si on a trop de cholestérol ou de sucre (diabète) dans le sang, si on a une hypertension artérielle non suivie et traitée (mangeons moins salé, c’est mieux que d’avaler des pilules !), si on passe d’un état de sédentaire régulier à un ou des efforts inhabituels, si on est en état de stress ou de burn out.

Il faut aussi être prudent si on a déjà un ou plusieurs parents (père, mère, grands parents, oncles et tantes, frères et sœurs, ayant déjà eu un problème artériel cardiaque ou carotidien, ou un diabète, ou d’autres facteurs de risque. Sur les 50.000 morts subites annuelles, on estime que 1/10 est directement liée à un effort inhabituel, lié souvent au sport. Dans les autres cas, ce sont les risques que nous avons cité qui  doivent être combattus, avec en tête le tabac et les surcharges en sel, sucre, graisses de notre alimentation.

Les 10 règles d’or des cardiologues du sport
Recommandations édictées par le Club des Cardiologues du Sport

  1. Je signale à mon médecin toute douleur dans la poitrine ou essoufflement anormal survenant à l’effort *
  2. Je signale à mon médecin toute palpitation cardiaque survenant à l’effort ou juste après l’effort *
  3. Je signale à mon médecin tout malaise survenant à l’effort ou juste après l’effort *
  4. Je respecte toujours un échauffement et une récupération de 10 min lors de mes activités sportives
  5. Je bois 3 à 4 gorgées d’eau toutes les 30 min d’exercice à l’entraînement comme en compétition
  6. J’évite les activités intenses par des températures extérieures < – 5° ou > +30° et lors des pics de pollution
  7. Je ne fume pas, en tout cas jamais dans les 2 heures qui précédent ou suivent ma pratique sportive
  8. Je ne consomme jamais de substance dopante et j’évite l’automédication en général
  9. Je ne fais pas de sport intense si j’ai de la fièvre, ni dans les 8 jours qui suivent un épisode grippal (fièvre + courbatures)
  10. Je pratique un bilan médical avant de reprendre une activité sportive intense si j’ai plus de 35 ans pour les hommes et 45 ans pour les femmes

* Quels que soient mon âge, mes niveaux d’entraînement et de performance, ou les résultats d’un précédent bilan cardiologique.

De fait, les médecins et cardiologues du sport contre indiquent rarement le sport en dehors de rares anomalies ou juste après un accident cardiaque. En pratique, si vous êtes jeune et faites un sport à risque en compétition (football, basket, rugby, marathon) ou de façon intensive, il est possible que ce soit votre fédération qui prenne en charge votre bilan avec dès 14 ans un ECG tous les 2 à 3 ans , une échographie avant 20 ans et parfois un test d’effort. Pour la majorité, le certificat du médecin traitant sera délivré après qu’il se soit informé de l’absence de problème dans la famille, et qu’il est vérifié si l’examen clinique n’a pas retrouvé un souffle cardiaque suspect (beaucoup sont bénins) ou une anomalie de votre ECG.

A l’âge adulte, chacun doit faire attention à quelques règles simples qui sont disponibles sur le site www.clubcardiosport.com. Elles se résument en 10 règles d’or et ont été reprise par le ministère de la santé via les fédérations.

Si vous avez déjà des facteurs de risques cardiaques importants, ou si vous avez déjà eu un accident coronaire ou vasculaire, votre médecin vous a recommandé la plus grande prudence : il a raison. Rappelez-vous cependant que dans les centres de réadaptations, on fait faire de l’exercice physique progressif, même après un infarctus ou une chirurgie du cœur, et que la plupart des sportifs pourront encore pratiquer du sport de loisirs, sans esprit de compétition. Il est alors très utile d’utiliser un cardio-fréquence mètre pour que le cœur ne batte pas trop vite dans les accélérations sportives.

Le sport est donc dangereux, mon bon docteur ? Oh que non !  Mais les efforts physiques intenses et prolongés provoquent encore beaucoup trop de mort subite.

Le sport et l’activité physique adapté à son âge, sa corpulence, sa souplesse, sa fragilité est toujours bénéfique pour la santé. Mais il faut toujours le pratiquer en s’échauffant et en restant à l’écoute de son corps.

C’est comme conduire une automobile.
Laisser le cœur au garage et la tuyauterie s’encrasse,
roulez à tombeau ouvert et l’accident vous guette.

Alors conduisez votre cœur selon votre humeur.
Conduite tonique ou conduite pépère, à vous de choisir,

et, surtout, n’oublier pas les révisions périodiques pour entendre dire que « parfaitvotre cœur est en forme ».

 Dr Bussière

 

 

1 réaction à cet article

  1. Merci encore pour toutes ces infos santé .

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