Les 10 erreurs de l’ultra traileur

On ne s’improvise pas ultra traileur. On le devient, notamment en apprenant de ses erreurs. Certaines sont toutefois évitables. Voici les dix les plus courantes, témoignages de spécialistes à l’appui.

  • Ne pas s’entraîner suffisamment tôt en amont

Ultra-traileur depuis dix ans (il a débuté en 2004 après plus de vingt an de pratique de la course à pied), mais aussi organisateur, Antoine Guillon est catégorique : « Il y a un gros manque de préparation chez les ultra traileurs. On voit certaines personnes qui se lancent après seulement deux ans de course à pied. Mais il faut prendre le temps de se construire un foncier et une musculature adéquats. Tout dépend bien sûr de l’objectif et du profil de chacun, mais un ultra se prépare au moins un an à l’avance. Il faut avoir une vision à long terme de son planning. Ca n’est pas en se préparant dans les deux derniers mois que l’on réussit ».

  • Manquer de fraîcheur

« Souvent, les coureurs ne coupent pas suffisamment tôt leur entraînement avant le jour J, souligne Philippe Propage, entraîneur (notamment de Thierry Breuil et Sylvain Court). Ils ont tellement peur de ne pas réussir qu’ils s’entraînent jusqu’au dernier moment. Du coup, ils arrivent sur l’épreuve avec un manque de fraîcheur évident. Je ne parlerais pas de la séance de trop, mais DES séances de trop ! D’autant que ce sont des séances longues, qui laissent des traces, sans que les athlètes s’en rendent comptent sur le moment. Parce qu’ils sont habitués à ce genre de séances. Il ne faut donc pas négliger la phase de relâchement. Par exemple, pour une athlète de 24 heures que j’entraîne, cette phase commence trois semaines avant la compétition. Et la dernière semaine, elle ne fait plus rien. En ultra trail c’est la même chose, on n’est pas dans la logique d’une course rapide où il faut garder le rythme. Il faut savoir relâcher. Mentalement c’est important aussi. Or la fraîcheur mentale est essentielle sur l’ultra ».

  • S’entraîner trop vite

« L’erreur, c’est de ne pas travailler à l’entraînement l’allure à qui sera la vôtre pendant la course. Autrement dit l’allure spécifique, précise Philippe Propage. Comme je le dis souvent, on est bon à l’allure à laquelle on s’entraîne. Ni au dessus, ni en dessous. Sur une sortie d’entraînement de 4 heures, on se sent peut-être capable de courir dans les côtes, mais sur un ultra, ce ne sera plus le cas. Il faut donc apprendre à marcher à l’entraînement. Parce que si la transition course/marche est simple, la transition marche/course est plus difficile. Le corps et les muscles doivent mémoriser cet effort. L’amplitude de la foulée est aussi modifiée à cette allure spécifique qui est souvent inférieure à la vitesse de footing. Ce n’est pas facile, mais il est indispensable de la travailler ».

  • Oublier de se préparer mentalement

« Il faut se préparer à souffrir, prévient Philippe Propage. Se dire que l’on va forcément passer par des phases où l’on se demandera : « qu’est ce que je fais là ? », « pourquoi ? ». Tout cela, il faut le préparer, se trouver à l’avance des arguments qui motivent. Ce n’est pas dans ces moments-là que le cerveau sera capable de réfléchir à des sources de motivation. Personnellement, quand je courais, je m’écrivais des petits mots, ou je demandais à des amis de m’en écrire. Et toutes les heures, j’en sortais un. Cela me rappelait le moment où je les avais écrits, tranquillement dans le canapé, et où je me disais : « là, tu vas avoir mal, mais c’est normal, et tu es prêt pour cela » ».

  • Ne pas étudier le terrain en amont

« Pour moi, l’étude du parcours, c’est le b.a.-ba ! », lance Antoine Guillon. « J’entends souvent des coureurs dire « je préfère découvrir sur place ». Mais à mon avis, c’est voué à l’échec. Parce ce que si l’on a un coup de mou, et qu’on ne sait pas que, derrière, se présente une grosse difficulté, on ne va pas savoir gérer son effort. Il faut donc étudier les cartes. Ca prend du temps, mais ça fait partie de la préparation mentale qui va aider à la réussite ».

  • Mal gérer sa stratégie de course

« Quand je parle de stratégie de course, précise Philippe Propage, j’entends notamment l’allure de course. Il faut être capable de savoir si on part à la bonne allure, et ne surtout pas se laisser entraîner par les autres. Surtout, faire SA course et non pas courir avec les autres. Ne pas faire de comparaison. Sur un 10 kilomètres, on peut tenter de s’accrocher à d’autres. Sur un ultra, non, chacun fait sa course. Si on a réussi sa propre course, le classement sera au bout. Et puis, il faut aussi être capable de marcher là où, si l’on était à l’entraînement, on aurait probablement couru. Ne surtout pas vivre cela comme un échec, mais comme un gain pour plus tard, qui fait partie de la stratégie ». L’expérimenté Antoine Guillon complète : « L’erreur classique, c’est de partir trop vite. On dit que c’est une question d’expérience, mais je crois surtout que c’est de la patience. Il faut partir sur un rythme que l’on est capable de tenir longtemps, pour le plaisir d’avoir un rythme constant. Et si l’on débute, alors mieux vaut partir encore plus lentement, être prudent, quitte à avoir une bonne surprise au fil de la course ».

  • Partir avec du matériel non testé

« Je vois souvent des coureurs qui utilisent un nouvel accessoire de sac, un vêtement qu’ils n’ont jamais porté, de nouvelles chaussures, de nouveaux bâtons, une nouvelle montre dont ils ne savent pas vraiment se servir, constate Antoine Guillon. Tout cela amène du stress inutile, alors que l’on a autre chose à gérer le jour de la course ». En clair, celui qui a terminé à six reprises dans le top 4 de la Diagonale des Fous, est formel : « On teste tout son matériel avant le jour J ».

  • Vouloir à tout prix suivre son plan de course prévu en amont

Nathalie Mauclair, championne du monde de trail, vainqueur de la TDS et de la Diagonale des Fous en 2013, insiste : « Il faut savoir adapter son planning à la fatigue, par exemple. On peut parfois partir sur une course en se disant : je m’arrêterai à tel endroit. Et vouloir à tout prix tenir jusque là. Mais personnellement, sur le Grand Raid, je n’avais pas prévu de m’arrêter au Col des Bœufs. Or je l’ai fait pour me faire masser. J’avais un kiné sous la main, c’était le moment. Si je ne l’avais pas fait, cela aurait vraiment été une erreur. Ce n’est pas une décision facile, et c’est souvent la suite qui dit si l’on a eu raison ou non… Mais il ne faut pas être trop rigide avec ce que l’on a prévu en amont. »

  • Ne pas assez anticiper ses ravitaillements de course

Nathalie Mauclair sait que la nutrition est un des éléments clés lorsque l’on augmente les distances et durées d’effort. « Il y a toujours une part d’inconnue. On ne sait pas comment va réagir son corps physiquement, mais aussi au niveau de la digestion. Sur le Grand Raid, à un moment, j’ai eu du mal à manger. Il n’y a avait plus rien qui me faisait envie. Et pourtant, il fallait bien que je mange ! Heureusement, j’avais anticipé en prenant des gourdes d’aliments liquides. Ca m’a aidée à passer ce cap difficile. Si je n’avais pas anticipé, je ne sais pas comment j’aurais fait… Il faut toujours prévoir qu’à un moment donné, même si l’on alterne, comme je le fais, le sucré et le salé, ça va être vraiment compliqué ». Et Antoine Guillon de poursuivre : « Il faut savoir ce qu’on va faire sur les ravitaillements. Je vois souvent des coureurs papillonner. S’asseoir, enlever leur sac, le remettre, puis s’apercevoir qu’ils ont oublié de reprendre de l’eau. Au final, ils s’arrêtent trop longtemps. Et ça peut avoir des conséquences notamment pour ceux qui sont proches des barrières horaires. Il faut savoir où l’on va ».

  • Négliger la récupération

Après l’effort, le corps a besoin de souffler ! Une évidence ? Pas pour tout le monde, visiblement… « Les ultra traileurs enchaînent souvent les courses, souffle Philippe Propage. Et ils ne récupèrent pas suffisamment. C’est encore plus classique chez ceux qui n’ont pas vécu d’échec. Les coureurs ont toujours peur de perdre leurs acquis. Je peux le comprendre, mais il n’y a pas de raison. Il ne faut surtout pas négliger cette phase de récupération, au risque de se blesser ».

3 réactions à cet article

  1. Très intéressant votre commentaire et conseilles a vous deux : M PROPAGE et M guillon je ne suis pas trailleuse mais très proche supportrice de mon fils, qui je pense 🙁 1) surcharge ses entrainements avant course ildevrais s, arrêter 10 jours avant le jour J : (2 ) marquer un repos 10 jours après course 🙁 ‘au dessus de 60 km ,) ,3)s alimenter correctement avant pendant et après! ET ne pas faire trop de courses sur une année au dessus de 50 kms , comme le conseille un athlète d, expérience :JULIEN RANCON, . Les athlète ne sont pas des machines et la machine s ,use si elle est mal réglée ou gérée. Merci encore de vos bons conseilles qui devrai être appliqués. respect a tous ces athlètes qui font beaucoup de sacrifices pour arriver au meilleur niveaux . sportivement

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  2. On voit trop de gens sans expérience de relative prendre part à de grosses courses avec un enchaînement tu certain
    Pour ma part je m’était promis de ne pas prendre part à un 100km route avant d’avoir 45 ans …avoir de la bouteille en course à pied ne peu apporter que du bon des que l’on se lance sur les distances au delà du Marathon ..on rentre dans un monde totalement different
    Le fameux Mur disparaît en ulltra ….il deviens ( pour ma part ) la zone d’échauffement. .je me suis aperçu lors de l’ultra Marin 2015 que je commençait à être bien apres 4h de course mais c’est propre à moi même et l’expérience à du bon pour se lancer dans les longues distances sans brûler les étapes tout comme la récupération très très importante après les ultras

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  3. Excellent article, tout est dit ! A chacun sa préparation, mais en résumé il y a 3 éléments à travailler : le physique (allure, endurance, technique), la logistique (matos, alimentation, reconnaissance) et le « psychologique », à ne surtout pas négliger. Pour mon 1er ultra on m’avait parlé de baisse de moral, de difficulté à réfléchir, de rêve éveillé, voir hallucination. J’ai tout eu… La solution 45mn de sommeil au 3/4 de la course pour re-booter le cerveau et finir. On ne peut pas préparer son esprit à subir 140km d’effort (car il souffre tout autant que les quadriceps), mais on peut s’entrainer à gérer le stress de nuit, écrire son plan de course pour toujours avoir des repères quand le cerveau part en vrille, s’exercer à la micro-sieste… En résumer, ne pas négliger la fatigue psychologique.

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