L’apnée à l’échauffement : une bonne idée ?

La réalisation d’un échauffement en natation est bien connue et admise de tous. L’amélioration du potentiel technique et énergétique est souhaitée afin d’optimiser la performance à suivre. L’échauffement permet d’augmenter la température du corps et celle des muscles, tout en stimulant l’influx nerveux et en facilitant le transport de l’oxygène. Un échauffement bien conduit permettrait d’améliorer les performances de 3 à 5%. Cependant, en natation, les stratégies d’échauffement varient d’un groupe d’entrainement à l’autre, avec des pratiques bien différentes.

Le cas de l’apnée

L’apnée semble être une méthode appropriée pour amplifier les effets de l’échauffement.

En effet, le simple fait de retenir son souffle, induit tout un tas de réponses physiologiques – comme la réduction de l’oxygène disponible, et donc une hypoxémie (baisse du niveau d’oxygène au niveau des reins et des poumons).

Cette réponse augmente l’acidose, entraîne un ralentissement du rythme cardiaque, réduit la saturation en oxygène et engendre une contraction splénique.

 

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Dès le début de l’apnée, le manque d’oxygène favorise la contraction splénique qui apparait comme un stress et qui est corrélée à la sécrétion de catécholamines par le système nerveux orthosympathique. Il existe aussi une amélioration de la capacité du corps à transporter l’oxygène grâce au nombre accru de globules rouges circulant, résultant de la contraction splénique. Il a déjà été montré que le taux d’hémoglobine et d’hématocrites pouvait augmenter de 2 à 5% après des apnées répétées.

Ces effets semblent s’avérer plus importants lors de la répétition de plusieurs apnées, plutôt que d’une seule apnée isolée. L’augmentation du volume de globules rouges circulant semble durer entre 8 et 9 minutes après la fin des apnées répétées. Avec toutes ces raisons, il est probable que l’apnée en fin d’échauffement, placée juste avant la course, pourrait induire une amélioration des performances. C’est d’ailleurs ce qu’a cherché à investiguer une équipe de chercheurs britanno-suédoise… (Robertson et al., 2020).

 

 

L’étude en question

Dans cette étude, les chercheurs ont évalué 4 protocoles différents sur la performance sur 400m nage libre chez des nageurs de compétition : 

  • un groupe de nageurs ne réalisant ni échauffement ni apnée (groupe contrôle), 
  • un groupe réalisant un échauffement seul
  • un groupe réalisant des apnées uniquement
  • un groupe réalisant un échauffement suivi de trois apnées répétées. 

Chaque nageur ayant pu passer dans chacun des 4 groupes au cours de l’étude.

 

 

Résultats

La combinaison échauffement + 3 apnées maximales répétées semble induire une amélioration meilleure que celle engendrée par un échauffement seul. Par rapport au groupe contrôle, le groupe échauffement seul a amélioré sa performance de 0,95%, alors que le groupe combiné échauffement + apnée a amélioré sa performance de 1,03%. 

Cette performance est principalement dû à une amélioration des paramètres de nage, avec une augmentation de la distance par cycle, et également d’une augmentation de 12% de l’indice de nage., démontrant une meilleure efficacité technique. Il est aussi intéressant de voir que la lactatémie du groupe échauffement + apnée était 18% inférieure à celui du groupe échauffement seul, ce qui laisse penser que les nageurs de ce dernier ont souffert d’une plus grande contribution lactique durant la course. Toutefois, aucune autre différence n’a été observée sur les variables physiologiques mesurées tels que le taux d’hémoglobines et le taux d’hématocrites.

 

 

Conclusion

Cette étude a permis de mettre en évidence que plusieurs apnées répétées peu de temps avant une épreuve de natation, pouvait autoriser un petit gain supplémentaire sur une épreuve de 400 mètres. Il est probable qu’un meilleur transport de l’oxygène dans l’organisme facilite la performance aérobie et améliore ainsi les paramètres techniques de nage telles que la distance par cycle notamment. Ces apnées peuvent se réaliser dans la chambre d’appel, quelques minutes seulement avant la course. Toutefois, il convient de rappeler qu’il est indispensable de s’habituer à ce genre de protocole au préalable. Le recours à cette méthode nécessite un certain confort pour pouvoir bénéficier des effets positifs de l’apnée. De futures études seront essentielles pour mieux comprendre les mécanismes physiologiques mis en jeu dans le cadre de l’apnée à l’échauffement et permettront également d’améliorer les protocoles proposés aux nageurs.

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Référence :

Robertson C, Lodin-Sundström A, O’Hara J, King R, Wainwright B, Barlow MEffects of Pre-race Apneas on 400-m Freestyle Swimming Performance. Journal of Strength and Conditioning Research. 2020;34(3):828–837. doi: 10.1519/JSC.0000000000002711.

 

3 réactions à cet article

  1. Bonjour Robin
    est ce sue tu pourrais préciser si les apnées ont été réalisé en phase inspiratoire ou expiratoire ?
    sachant que une apnée inspiratoire active le système orthosympathique et qu’une apnée expiratoire active le système parasympathique.
    Et donc sur cette étude les apnées sont sur la phase expiratoire ?
    merci

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  2. Salut Sylvain, dans l’article cela n’est pas vraiment précisé.
    Toutefois, l’article dit que les apnées ont consisté à réaliser une apnée « maximale » où le but était de retenir sa respiration le plus possible, jusqu’à une interruption volontaire du nageur. Les apnées étaient faites en position assise. Il y avait 3 apnées successives, entrecoupées de 2 minutes de repos passif entre chaque apnée.
    Pour répondre plus finement à ta question, je pense que l’apnée se faisait donc après une longue inspiration (et donc probablement une stimulation orthosympathique à ce moment). Cependant, l’étude a mesuré la fréquence cardiaque avant et après chaque apnée. Et les résultats montrent bien une baisse de la fréquence cardiaque après la période d’apnée, et donc une probable activation parasympathique.
    Bien à toi

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  3. Robin
    J ai déjà utilisé l apnée sur un protocole de recup après les courses.
    Qu en penses tu?

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