Une séance tempo en côte chez le traileur

La séance tempo est une séance utile quelle que soit sa discipline, notamment pour se rapprocher des conditions de course. Dans le cas des ultra traileurs qui sont contraints à de longs et forts dénivelés en course, elle peut se dérouler dans une portion uniquement montante. Voyons comment paramétrer une telle séance et quels intérêts en retirer.

Pour les coureurs sur route et les traileurs, la séance tempo consiste bien souvent à courir à une intensité proche de l’intensité de course, et donc sur une durée moindre, à la recherche d’un état stable. Selon sa spécialité, les intensités peuvent donc varier.

Pour le marathonien, cela peut correspondre à l’allure spécifique marathon, à tenir sur 30 min ou 10 km par exemple, à une intensité proche des 80% de VMA, et à affiner selon son expertise.

Pour un spécialiste de trail court, l’intensité à tenir sera sensiblement la même, mais c’est le terrain et la vitesse qui changent. Puisque la vitesse n’est plus un repère (en effet elle change constamment selon le dénivelé et la technicité du terrain), on peut se fier aux fréquences cardiaques, et notamment à la fréquence cardiaque de réserve qui est bien corrélée à l’intensité de l’effort en terme de consommation d’oxygène.

Par contre, pour un ultra traileur, est-ce que cette séance a de l’importance si on évolue à une intensité proche de l’intensité cible de la course ? La réponse est non car l’intensité moyenne d’un ultra est celle de l’endurance fondamentale, ce qui veut dire que chaque sortie longue est une sortie à intensité spécifique. Il faut donc jouer sur l’intensité moyenne de la séance qui sera plus élevée que celle de la première partie de course, afin de développer les adaptations métaboliques nécessaires et progresser, notamment en montée.

 

Endurance, pacing et endurance de force

 

Le travail en côte, déjà très utilisé chez les pistards et les traileurs, est davantage essentiel en trail car il correspond à une spécificité de la discipline. Nous avons déjà parlé des différentes modalités de travail en montée, sur toutes durées, technicités et dénivelés, avec des objectifs à chaque fois différents, qui peuvent être d’ordre cardiovasculaires, musculaires, biomécaniques, techniques et même mentaux.

La séance que nous allons évoquer à présent est un 30 minutes en côte continue. Bien entendu, elle ne s’adresse qu’aux traileurs bénéficiant d’un terrain adéquat, même si on peut l’envisager également sur tapis roulant incliné. Les objectifs sont les suivants :

– Travail de pacing, c’est-à-dire de gestion de l’intensité de l’effort. Il s’agit d’être le plus régulier possible à des fins d’économie musculaire et de déplétion énergétique. Pour travailler le pacing, il faut donc déterminer une FC cible, ce qui n’est pas si simple.

– Endurance de force : monter nécessite la production d’un certain niveau de force, proportionnel au pourcentage de la pente. Au-delà de 15%, on rentre dans le concentrique pur et il n’y a plus de stockage-restitution d’énergie élastique. Rappelez-vous que le couple Force-Endurance de force est à mettre en parallèle avec le couple VMA-Endurance. Ils sont également liés par le fait que l’amélioration du 1er couple permet l’amélioration de l’indice d’endurance (ou fraction de VMA/PMA/VO2max), facteur essentiel de la performance, toutes disciplines aérobies confondues.

 

Paramétrer sa séance

 

Pour la durée, 30 min est un bon choix de départ qui permet de vérifier qu’un état stable est atteint, avec une dérive cardiaque limitée, et l’absence de douleurs musculaires. Le plus difficile est de paramétrer l’intensité car elle est dépendante non seulement de la durée mais également de la signature énergétique individuelle. Disons qu’une moyenne de 80% est intéressante sur 30 min.

Dans le cas présent, l’athlète présente un indice d’endurance très élevé. L’examen de ses performances en ultra montre que les montées sont gravies à 75-80% d’intensité. L’intensité exigible pour la séance sera donc de 85%, et en raison du fort enneigement dans les Alpes, le parcours sera essentiellement sur la route. Le tempo est toujours précédé d’un échauffement afin que l’intensité cible soit ensuite rapidement atteinte sans contraction de dette d’oxygène ; et le tempo sera suivi d’une période plus ou moins longue de retour au calme. Ce tempo peut aussi s’intégrer au sein d’une séance longue.

 

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Données Suunto de la séance tempo : FC en jaune et altitude en blanc

 

Données recueillies sur les 30 min tempo :

FC moyenne : 162 FC max : 171

D+ : 390 m

Distance : 5.6 km

Vitesse moyenne : 11.1 km/h et vitesse max 14.4 km/h

 

Données au regard de l’athlète :

FC moyenne à 86% de la FC de réserve, et FC max de la séance à 95% de la FC max

On observe une légère dérive cardiaque, mais qui n’est pas inquiétante compte tenu de l’excellent freinage cardiaque à la fin du tempo. En effet, les FC passent de 171 à 134 en moins de 2 minutes alors que la progression se fait toujours en montée. La vitesse moyenne, qui reste très dépendante du terrain, montre toutefois qu’il s’agit d’une athlète élite. Elle aura accompli 18 km en 1h45 avec 730 m de d+/d-.

Ce type de séance peut se programmer une fois tous les 15 jours car elle permet d’évaluer son niveau de forme sur une durée d’effort intéressante. Elle peut ensuite évoluer vers des durées plus longues si le terrain le permet. Elle peut également se réaliser sur tous types de pourcentages et de technicité, l’essentiel restant la gestion de l’intensité. Dans le cas présent, les objectifs sont atteints et la séance est validée.

 

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