Faut-il être montagnard pour terminer une épreuve de l’UTMB© ou la Diagonale des fous ?

Technicité, altitude, dénivelé, les ultra trails en montagne sont-ils réservés aux montagnards? Pascal Balducci, entraîneur trail et expert lepape-info, vous apporte des éléments de réponse.

UTMB 2013

Les exemples sont nombreux d’athlètes de plaine parvenant à performer en ultra trail, que ce soit au Mont Blanc ou à la Réunion. Citons Nathalie Mauclair et Erik Clavery entre autres. Pour autant, compte tenu des difficultés de ces épreuves, on ne peut nier l’avantage de vivre et d’évoluer dans ce milieu.
Rappelons pour cela les particularités du trail. Il s’agit de course à pied, certes, mais pas que ! Le dénivelé et la technicité impliquent une motricité particulière, donc des sollicitations musculo-tendineuses différentes, en qualité et en quantité.

  • Le dénivelé

Les montées exigent une production de force qui croît avec la pente (au-delà de 15% de pente, le renvoi d’énergie élastique est nul, seule la force concentrique est à l’œuvre) et les descentes impliquent un travail en excentrique (allongement des fibres musculaires) rapidement inflammatoire suite à la destruction du squelette protéique cellulaire (lyse musculaire).

S’entraîner à plat est insuffisant pour se préparer à ces contraintes. Deux solutions cumulables s’offrent alors aux athlètes de plaine : la réalisation de courses de préparation, de week-end ou encore mieux de stages en montagne, mais aussi la pratique du renforcement musculaire en routine d’entraînement. Lors des séjours en montagne, on privilégiera les efforts longs-continus en côtes et en descentes.
Sachez également que l’organisme se protège des contraintes de la descente (production accrue de CPK et survenue de douleurs musculaires – les DOMS -) pendant environ 6 semaines. Au-delà, le désentraînement est effectif, et même si vous courez très régulièrement en plaine, vous ne serez en aucun cas protégés contre les désagréments de la pente. Pour le renforcement musculaire, reportez-vous à l’article cité, mais n’oubliez jamais que ce travail ne vous prépare ni à la technicité des terrains, ni à l’engagement qui fait souvent la différence en descente. Seul le musculaire est amélioré, mais c’est déjà beaucoup.

  • La technicité 

En plaine, le pied se pose à plat, la foulée est le plus souvent régulière. En terrain montagneux, c’est bien différent. Le passage de blocs rocheux, la boue, les racines…limitent la progression et la foulée doit s’adapter en permanence. Certes, on peut travailler la proprioception en salle ou à l’extérieur, mais rien ne remplace le travail de terrain. C’est là aussi un handicap pour le coureur de plaine.
Dénivelé et technicité imposent souvent la marche comme mode de progression, et l’alternance marche-course. A cela, un coureur de plaine n’est pas préparé, ni physiquement ni psychologiquement. La gestion de l’effort en est fortement modifiée et seules les conditions citées plus haut lui permettront de s’y préparer.

  • Les conditions météo, l’altitude

N’est pas montagnard qui veut. La connaissance du milieu est un plus certain, surtout quand les conditions atmosphériques se dégradent. Pour les courses se déroulant en altitude, ou avec des passages élevés (au-delà de 1 800m), des pathologies plus ou moins aigues s’apparentant au mal aigu des montagnes (MAM) peuvent apparaître (voir cet article sur la gestion de l’altitude). Comme pour la chaleur, l’acclimatation est un plus certain. La possibilité d’évoluer régulièrement à ces altitudes développe la capacité à y performer.  Il ne s’agit pas ici d’utiliser l’hypoxie pour performer en plaine, mais d’utiliser l’hypoxie pour y évoluer plus facilement. Sur une course comme la Hardrock évoluant très haut, avec un point culminant à 4 200m, ce paramètre est fondamental. Mais les cols autour du Mont Blanc offrent également des altitudes contraignantes auxquelles un montagnard sera plus habitué.

En conclusion, un montagnard sera toujours mieux aguerri aux ultra trails de montagne qu’un coureur de plaine. Et pour réduire la fracture séparant ces 2 catégories de coureurs, le renforcement et la réalisation de séjours en montagne sont fortement indiqués.

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