Entraînement par analogie : attention danger !

S’entraîner est un acte apparemment simple qui requiert pourtant de l’expérience, des connaissances, et la capacité de se remettre en questions.

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S’entraîner par analogie, ça veut dire quoi ?

L’analogie est la ressemblance, je vais donc m’entraîner à l’image de mes objectifs. Si je suis spécialiste des 10 kms, je vais faire des 10 kms à l’entraînement ; si ma spécialité est le semi-marathon, je vais parcourir des 20-21 km régulièrement ; et si je prépare le marathon, je ne vais pas me gêner pour en parcourir au moins 1 à l’entraînement. Ici, la caricature est poussée à son paroxysme, mais beaucoup s’en rapprochent.

 

Se rassurer

Pourquoi raisonner ainsi ? Parce qu’il est évident que si je réussis à couvrir la distance objectif à l’entraînement, je le ferai en compétition. C’est donc avant tout un besoin de se rassurer. Le prolongement de ce raisonnement est de pouvoir répéter ensuite la distance de plus en plus rapidement. Cette manière simpliste de penser a été encouragée par des méthodes d’entraînement peu orthodoxes dont on a voulu retenir que le côté spectaculaire.

En effet, Emil Zatopek couvrait régulièrement ses distances de compétition sous forme de fractionné (je divise ma distance en un certain nombre de fractions). Cela fonctionne très bien pour un 5 000 m que je peux diviser en 5 x 1 000 m ou 12-13 x 400 m, ça commence à être compliqué pour le 10 000 m que je dois diviser en 25 fractions de 400 m ; et cela devient de la folie pour le marathon. Cette folie, Zatopek l’a réalisée en accomplissant l’incroyable séance de 100 x 400 m, mais c’était Zatopek, un coureur d’exception.

 

Les limites

S’il est concevable pour les élites sur marathon de parcourir parfois une quarantaine de kilomètres à l’entraînement (sans dépasser 2h30), c’est plus compliqué pour un non-expert pour qui cela prendra entre 3h30 et 5h, s’il va au bout !

Quant au trail, je vous laisse imaginer celui qui veut se rassurer sur un format 100 miles. Et pourtant ? Mais l’aberration n’est pas flagrante qu’en ultra endurance. Imaginez le sprinter qui ne ferait que des 100 m ou des 200 m à l’entraînement ! Pour lui aussi, le risque de blessure serait fortement accru par une hyper sollicitation des mêmes filières bioénergétiques et mêmes fibres musculaires.

Sur la figure ci-dessous, un jeune athlète, talentueux et extrêmement motivé, m’a montré sa précédente programmation d’entraînement pour le trail long. Attention à ne pas être dans le jugement mais dans l’analyse :

 

 

Course à Pied

20 kilomètres – 4 fois dans la semaine (Variante fractionné)

50-60 kilomètres – 2 fois dans la semaine (Variante fractionné)

  • Lundi : 20 km – 70-80% VMA max : renfort musculaire
  • Mardi : 20 km – 70-80% VMA max : musculaire
  • Mercredi : 60 km – 50-60% VMA max : renfort musculaire
  • Jeudi : 20 km – 70-80% VMA max : musculaire
  • Vendredi : 60 km – 50-60% VMA max : renfort musculaire
  • Samedi : 20 km – 50% VMA max
  • Dimanche : Sortie Cool

 

Vu les chiffres ronds, les calculs sont assez simples à faire : 200 kms par semaine. On note quelques variations binaires des intensités et des objectifs, mais on se doute bien que dans la réalité le travail doit être très répétitif.

 

Des principes à respecter !

Nous avons souvent évoqué ici la quantification d’entraînement et les principes de répartition des charges (progressivité, alternance des sollicitations énergétiques, transfert, individualisation …). Rien de tout cela n’est pris en compte ici.

  • Les charges (en unités arbitraires = durée x ressenti d’effort RPE) sont phénoménales.
  • La monotonie est énorme car tout est réalisé à pied (pas d’approche croisée) et quasi aux mêmes intensités.
  • Aucun jour de repos n’est prévu pour casser cette dynamique infernale.
  • Aucune séance de côtes/descentes.
  • Pas de fractionné, donc pas de travail qualitatif. Le pôle puissance de la filière aérobie est oublié.
  • Pas de séance dédiée au renforcement musculaire même si cela est indiqué chaque jour, car il est vrai que courir renforce.
  • Des sorties longues de 60 kms ! (Réservées uniquement en cas de reconnaissance d’un UTMB ou d’un Tor des Géants pour des traileurs expérimentés.)

Bref, à moins d’avoir une constitution exceptionnelle, il n’est pas possible de tenir ce plan plus de 2-3 semaines. Les risques de blessures physiques (tendinopathie, fracture de fatigue, entorse…) sont accrus et le syndrome de surentraînement guette.

 

Courir moins mais mieux

Ce jeune traileur a eu la chance d’être détecté lors de journées de sélection et de pouvoir bénéficier d’un encadrement porteur et protecteur. En divisant ses charges globales par 2.5 à 3, en diversifiant les contenus, en dédiant des séances au renforcement musculaire mais aussi à la vitesse, la force et la coordination, et en ayant une approche croisée (VTT, vélo de route), il a pu passer des paliers et optimiser ses chances d’être l’un des premiers espoirs français en 2017 sur le circuit trail court.

Pour autant, les objectifs demeurent à long terme, tant que toutes les habiletés physiques et mentales indispensables à notre sport ne seront pas développées et portées à leur potentiel maximal. Mais pour un athlète qui s’en sort, de nombreux autres rentrent littéralement dans le mur avec des blessures à répétition et une démotivation qui peut rapidement mettre fin à l’activité. Dans le meilleur des cas, il n’y a pas de blessure mais une stagnation du niveau de performance symptomatique d’une absence de stimuli à l’entraînement.

N’oubliez jamais que s’entraîner, c’est stresser son organisme (corps et mental) pour le forcer à s’adapter et à élever son niveau de potentiel. Pour cela, seule une approche multifactorielle est concevable et bénéfique sur le long terme. À bas l’analogie, vive le contraste !

4 réactions à cet article

  1. Jeune athlète, je veux bien, au CP ?

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  2. Très bonne analyse avec exemple pertinent à la clé, mais les fautes tout de même !!! je n’ai même pas lu le texte tellement ça m’accrochait les yeux!

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