Benjamin Malaty : « Sur un championnat d’Europe de marathon, tout est redistribué »

Actuellement gêné par quelques pépins physiques, Benjamin Malaty n’en garde pas moins les yeux rivés sur les championnats d’Europe de marathon en août. Avec les Jeux Olympiques 2016 en ligne de mire.

Benjamin Malaty
Benjamin Malaty, premier Français du marathon de Paris 2013 (2h12mn00s).

Lepape-info : Après des douleurs aux ischios, c’est votre genou qui vous fait souffrir ? 

Benjamin Malaty : Oui, une inflammation de l’aileron rotulien. Ce n’est pas très grave, mais je ferai l’impasse sur les France de cross car je n’ai pas envie de me contenter d’être moyen sur la course. Ça doit être la première fois depuis douze ans que je ne participerai pas à ces championnats, mais tant pis. J’avais soigné mes ischios suite aux championnats d’Europe de cross-country (voir les résultats). Mes douleurs venaient en fait d’une dent de sagesse qui en apparence ne me faisait pas mal mais me créait des tensions plus bas. J’ai repris le 2 janvier 2014. Finalement, deux semaines après, je me blesse au genou. C’est un peu la galère. Mais en même temps, je suis dans le haut niveau depuis dix ans et je n’ai pas été blessé souvent. Donc ça me permet de souffler un peu…

Lepape-info : Cela perturbe donc votre début d’année, quel sera la suite de votre programme ?

B. M. : L’objectif principal reste les championnats d’Europe de marathon à Zurich (12-17 août 2014). Je ferai peut-être un peu de route avant cet été, sur un semi et 10 km. L’idée, c’était de profiter de cette période sans marathon pour gagner un peu de vitesse. J’envisage de participer aux championnats de France de 10 km à Valenciennes. Ca me fera un petit objectif intermédiaire. Et ensuite, j’aimerais un gros semi en avril ou juin, certainement à l’étranger.

Modalités de sélection
pour les championnats d’Europe
de marathon 2014
Les critères de la Fédération Française d’Athlétisme prévoient de sélectionner un maximum de 6 hommes et 6 femmes. Les minima ont été fixés à 2h13mn00s pour les hommes et 2h31mn00s pour les femmes.
La sélection devrait être établie notamment en fonction des critères suivants :
– le respect des règles fédérales qui seront communiquées aux athlètes par le manager en charge du marathon, notamment, la validation du programme de compétition entre le marathon de Paris et celui de Zurich par la DTN.
le premier homme et la première femme du championnat de France 2013 de Marathon (Ruben Iindongo et Corinne Herbreteau-Cante, voir les résultats).
– les performances des athlètes sélectionnés aux championnats du Monde 2013 de Moscou.
– les meilleures performances réalisées sur un marathon labellisé FFA ou IAAF entre le 1er janvier 2013 et le 14 avril 2014.
– le respect des règles préalables à l’épreuve qualificative (Information de la DTN avant la participation à l’épreuve sur le choix de l’épreuve – suivi médical préalable)

Lepape-info : Avez-vous parlé avec Jean-François Pontier (manager du hors stade) et Philippe Rémond (ambassadeur du marathon auprès de la FFA) ? Votre participation aux championnats d’Europe vous semble-t-elle acquise (voir les critères ci-contre) ?

B. M. : Je ne suis évidemment pas sûr à 100% qu’on me fasse confiance. Mais bon, j’ai fait un chrono l’an dernier (2h12mn00s à Paris, premier Français, ndlr), il y a eu Moscou derrière (les championnats du monde où il a terminé 28ème en 2h19, ndlr). Je discute souvent avec Jean-François, on se connaît depuis longtemps, il m’accompagne dans ma préparation. Philippe, je ne l’ai pas encore vu, mais on se croisera bientôt je pense. Dans ma tête, ma participation est assez claire, mais il faut aussi prouver sa forme. D’où l’importance d’être là au printemps.

Lepape-info : Quel est votre avis sur la création de ce collectif marathon par la Fédération Française d’Athlétisme ? Le voyez-vous comme une belle opportunité pour vous ? Et qu’en attendez-vous ?

B. M. : Je crois que cela peut créer une émulation. On est chacun dans notre coin, c’est assez typique de l’athlétisme. Les regroupements feront forcément du bien pour progresser. C’est intéressant aussi d’avoir un suivi plus poussé. Ce sera un plus, j’en suis persuadé. Et pour moi, c’est vrai que ça tombe à pic. J’ai fait de bons chronos, et cela peut peut-être me permettre de progresser davantage. Je suis toujours preneur d’un maximum de conseils. Et puis, on va se tirer un peu la bourre.

Lepape-info : Il y a aussi l’aspect financier et une éventuelle rémunération, en avez-vous parlé ?

B. M. : Pas de rémunération directe, mais plutôt des moyens pour les stages, des dédommagements en cas de congés sans solde pour des compétitions. Cela existait déjà, mais cela va être amplifié. Après, il y aura peut-être de petites rémunérations par exemple pour éviter d’aller sur certaines épreuves. Cela pourra nous permettre de vivre un peu plus sereinement notre sport. Mais surtout, de créer une densité supérieure. Et ça nourrira aussi le semi-marathon, le cross…

Lepape-info : Revenons aux championnats d’Europe, dans quel état d’esprit irez-vous ? En vous disant qu’il y a un coup à jouer ?

B. M. : C’est exactement ça. Sinon, je n’arriverai pas à le préparer de manière optimale. Dans les bilans, je suis relativement proche du top 10 européen (12ème en 2013 avec 2h12mn00 à Paris, ndlr). Je suis à 2mn, 2mn30 de ce qui se fait de mieux en Europe (l’Espagnol Ayad Lamdassem, troisième meilleur performeur européen en 2013, a réalisé 2h09mn28s à Londres, ndlr). Sur un championnat d’Europe, tout est redistribué. Je ne dis pas que j’y vais pour faire un podium, mais je vais me préparer comme si. Je sais aussi que ce sera dur, parce qu’il y a une médaille à aller chercher pour beaucoup. Mais c’est source de motivation. C’est le moment où il faut être en forme. Et être dans le top 10, ce serait déjà très bien.

Lepape-info : Quels enseignements tirez-vous de Moscou, six mois plus tard ?

B. M. : Je sais qu’il est difficile d’enchaîner un marathon au printemps et un rendez-vous de ce type en été. Je suis content de ne pas avoir à le faire cette année. J’étais dans l’euphorie des championnats du monde, donc sur le coup ça n’a pas été dur. Mais après les Mondiaux, j’ai eu plus de mal. J’ai vite tiré un trait sur Moscou, mais je n’ai aucun regret. Ni dans ma préparation, ni dans ma façon d’aborder l’événement. Il me fallait une grande expérience comme celle là. Et commencer par un championnat du monde, ce n’était pas si mal. Evidemment, j’aurais aimé faire une dizaine de places de mieux…. Mais il faut apprendre, et ça prend du temps. J’ai toujours fonctionné comme ça.

Lepape-info : L’an passé, juste avant le marathon de Paris, vous disiez que la barre des 2h10 était « prématurée » (voir son interview). Quelle est votre analyse aujourd’hui, a-t-elle évolué ?

B.M. : 2014, c’est une année de transition, pour repartir et améliorer mes chronos sur 10 km et semi-marathon. 2015 sera l’année de qualification pour les Jeux Olympiques (au Brésil en 2016, ndlr). On ne connait pas les minima, mais ce sera probablement moins de 2h10. J’ai deux minutes à gagner. En un an à un an et demi. Je reste lucide, je sais qu’il faut grappiller petit à petit. Faire moins de 2h10 en 2015, ce serait déjà extraordinaire. J’en suis capable, mais avec un gros travail, une énorme implication. Cela impose de  réfléchir à beaucoup de choses, dans la manière d’aborder l’entraînement et tout ce qu’il y a autour.

Lepape-info : L’objectif à plus long terme reste Rio 2016 ?

B. M. : Oui. Tout est programmé dans ma tête, et les grandes lignes de mes compétitions sont fixées. Depuis que j’ai fait mon premier marathon, j’essaie d’avoir une vraie cohérence pour optimiser mes performances.

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